Devenue désormais annuelle, la Biennale des
antiquaires s'est ouverte le 11 septembre 2017 jusqu'au 17 avec l'espoir de
trouver un nouveau souffle après avoir été déstabilisée par les affaires de
faux meubles du 18e siècle auxquelles ont été mêlés certains de ses grands exposants
ainsi que par une désaffection croissante des acheteurs étrangers
La dernière édition n'avait attiré que
30 000 visiteurs contre 75 000 en 2014 à cause du climat ambiant en France qui
avait suivi l'attentat de Nice en laissant à son organisateur un passif de plus
de deux millions d'euros, ce qui n'était jamais arrivé auparavant. Maintenant, il a fallu repartir pratiquement de zéro pour redonner vie à cette manifestation rebaptisée Biennale Paris qui n'a compté que 93 exposants, soit 32 de moins qu'en 2016 avec moins
d'étrangers alors que la foire de la TEFAF à Maastricht en a attiré 275 pour
démontrer qu'elle a énormément perdu de son lustre en se privant par ailleurs
de nombre de galeries de joaillerie qui faisaient auparavant en grande partie son succès.
Cette année, les acheteurs Américains se
feront sans doute encore discrets alors que les exposants ont mis l'accent sur
le classique et le dynamisme sous la nef du Grand Palais avec quelques pièces
de choix, comme une toile de Picasso datée de 1963 montrant un paysage
anthropomorphe présentée par la galerie Hélène Bailly ou un ensemble de quatre tapisseries commandées par Colbert à la
Manufacture Royale des Gobelins exécutées par les plus grands lissiers de leur
époque entre 1665 et 1673 à partir des Chasses de Maximilien d'après des
cartons du peintre flamand Barend Van Orley.
Les
visiteurs auront pu admirer des pièces antiques sur le stand de la galerie
Kevorkian, deux oeuvres de Magritte sur celui de la Boon Art Gallery et quelques pièces
intéressantes présentées par les galeries Berès, Tamenaga, Richard Green, La
Présidence et celles exposant des tableaux anciens mais dans l'ensemble, ils seront peut-être restés sur leur faim car la renaissance de la Biennale ne se fera
pas du jour au lendemain.
Christopher « Kip » Forbes, le président de ce nouveau concept dont le
nom est associé au prestigieux magazine portant son nom, s'est toutefois montré résolument optimiste en affirmant que La
Biennale Paris restait la foire la plus importante dans son domaine en France
et l'une des plus importantes au monde. Connu pour être un grand collectionneur, le milliardaire américain qui a succédé
à Henri Loyrette, l'ancien président du Louvre, s'est donc mis en tête de redorer le blason de la Biennale à travers une sélection rigoureuse des 5000 pièces
présentées par ses exposants, dont 33 venus de l'étranger.
Le clou de la manifestation a été l'exceptionnelle exposition de
pièces issues de la collection Barbier-Mueller d'art africain et océanien, qui
s'est déployée dans deux salles de 110 m² chacune, situées aux deux extrémités
du Grand Palais, ce qui a permis aux visiteurs d'admirer un exceptionnel masque
Hongwe, collecté au Congo français en 1917 avec à ses côtés, un magnifique petit masque kwele
ayant appartenu à Tristan Tzara, un tabouret royal du Cameroun, des éditions
originales des XVIIe et XVIIIe siècles, des tableaux de Georg Baselitz et
d'Élisabeth Vigée Le Brun, des casques japonais dits « kawari kabuto » ou une Woman in Tub signée
Jeff Koons, fruits du goût de Josef Mueller et de ses successeurs qui ont joué
un rôle majeur sur le marché de l'art.
Il a fallu aussi veiller à assurer une présentation de pièces ne souffrant
pas de contestation possible avec l'aide d'experts de premier plan et du
laboratoire français ArtAnalysis car la réputation de cet événement ne pouvait
certainement se retrouver soumise à un
nouveau scandale après ceux de faux meubles du 18e siècle, des
manuscrits vendus par la Sté Aristophil tombée en déconfiture, des tableaux de grands maîtres anciens bidouillés ou des
carnets douteux de Van Gogh sortis en 2016. Autant dire que l'écrémage a été
sévère.
La Biennale a donc tenté de retrouver un nouvel élan avec
l'espoir pour ses organisateurs de redonner à Paris une dimension internationale dans le but de renverser enfin
la vapeur après avoir failli prendre l'eau. Avec Christopher Forbes à la barre
pour faire voguer les grands marchands parisiens vers la voie du succès dans un
décor imaginé et conçu par Nathalie Crinière, la route reste pour elle encore pavée d'embûches
dans une ville à peine réveillée des vacances, confrontée d'emblée à des
manifestations contre la Loi travail et à des menaces persistantes d'attentats.