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01 Août 2005



Cet article se compose de 2 pages.
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En attendant, hormis Fautrier, Klein et quelques autres, la plupart des peintres modernes et contemporains ont inconsciemment plagié des maîtres, à commencer par Picasso qui s'inspira de plusieurs artistes pour développer son œuvre. On peut ainsi dire qu'il fut le plus grand adaptateur de l'histoire de la peinture sans avoir rien inventé, pas même le Cubisme dont la paternité revenait en grande partie à Braque alors que Cézanne fut à l'origine de ses fondements. Cela n'a cependant rien enlevé au génie de Picasso, considéré de loin comme le plus grand artiste du XXe siècle.

Quoiqu'il en soit, nombre de peintres devenus célèbres ont « pompé » d'autres artistes, tant au niveau du style qu'à celui des idées, avec le mérite d'attirer vers eux les grands collectionneurs. Encensé en 1959, Manessier n'a pas eu la gloire de Poliakoff ou de De Staël simplement parce que ces deux artistes ont été plus médiatisés sur le marché.

On connaît le succès d'un Bernard Buffet mais on ignore que plusieurs peintres produisirent des œuvres similaires aux siennes au milieu des années 1940. Aujourd'hui, ceux-ci ont été oubliés.

A la fin des années 1950, de nombreux galeristes se gaussaient de Fautrier ou de Klein qui ont pris plus tard une revanche éclatante sur les peintres qu'ils représentaient et que Fautrier traitait avec ironie de « post-cubistes » alors qu'il se voulait le représentant d'une peinture authentique.

Cela posé, un emprunt en peinture n'est pas vraiment de la copie ou un plagiat, mais juste la manifestation souvent inconsciente d'une influence. Face au tableau d'un artiste on se surprend d'ailleurs souvent à remarquer des ressemblances avec le style d'un autre. Il suffit de visiter un musée, de se placer à dix mètre d'une peinture et d'essayer de deviner qui en est l'auteur. A cette distance, on peut faire la confusion entre Bourdon et Poussin, entre Watteau et Lancret, entre Jongkind et Boudin, entre Gauguin et Sérusier, entre Cross et Signac et j'en passe. Watteau eùprunta beaucoup à Gilot avant d'inspirer Lancret ou Pater, Claude Gelée donna certainement des idées à Constable dût vraisemblablement séduire Corot lequel attira l'œil de Boudin qui à son tour impressionna Monet. Picasso ne fut pas en reste en passant de l'académisme à une peinture marquée par des débuts difficiles avant de devenir un pape du Cubisme et de décliner son art sous presque tous les angles tout en s'inspirant de Julio Gonzales pour créer d'étonnantes sculptures.

L'art ne progresse qu'à travers des emprunts qui figurent ainsi parmi les jalons essentiels de son développement. En période de rupture, les artistes se transforment un peu plus en plagiaires, les plus connus profitant alors de l'appui de marchands dotés d'un grand sens du marketing. On peut donc les soupçonner d'être quelque part des imposteurs (telle était l'opinion de Fautrier au sujet des expressionnistes-abstraits) sauf que le succès leur a servi d'écran. Le marché rend ainsi gloire à ses favoris sans que ses intervenants se soucient des facteurs qui leur ont permis de parvenir au devant de la scène. Cela peut paraître injuste mais la chance et l'opportunisme jouent un rôle considérable dans le succès d'un artiste.

Traiter Serge Poliakoff de plagiaire semble pour le moins grossier mais il n'en demeure pas moins que celui-ci, tout comme d'autres peintres aussi connus, laissa son subconscient butiner d'autres influences.

Peut-on parler de plagiat lorsque des peintres adhèrent à une tendance, comme ce fut le cas du Fauvisme héritier du Divisionnisme initié par Seurat qui à la suite de Derain et de Vlaminck attira des artistes comme Braque, Matisse, Manguin, Friesz, Van Dongen, Jean Puy et d'autres ? Pareil constat peut être fait au sujet du Cubisme, mis au goût du jour par Braque et Picasso et auquel adhérèrent plusieurs artistes comme Juan Gris, Hayden ou Marcoussis ou encore de l'abstraction qui en a dérivé.

Les principes édictés par les chefs de file de nombreux mouvements (Cubisme, Suprématisme, Constructivisme, Futurisme, Surréalisme, Abstraction ou Musicalisme entre autres) ont imposé des règles qui elles-mêmes ont engendré des emprunts et forcément des plagiats involontaires mais nécessaires pour les respecter. On reste là encore bien à l'écart des plagiats intentionnels et encore loin de la création de faux mais il n'en demeure pas moins que les limites de la tromperie ont souvent été frôlées lorsque les peintres ont employé des styles et des formules similaires. Quant aux faussaires, ceux-ci n'ont eu aucun mal à verser crûment et directement dans la falsification en essayant de reproduire avec des variantes ce que les maîtres avaient produits. Ceux-là ne sont rien moins que les terroristes de l'art, ne serait-ce déjà parce que le faux s'avère être la terreur de tout expert.

Adrian Darmon

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