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On finit par être pendu à son ordinateur à force de trop enchérir dans les ventes sur Internet. "j'E-Bay ou j'E.Bay pas ?"
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L'ART ET LA POLITIQUE par Adrian Darmon
16 Août 2007 Catégorie : FOCUS
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Les gens contemplent en général une œuvre d'art enfonction de son attrait esthétique en se demandant rarement si elle a ou a eu une signification autre qu'artistique, ce qui est somme toute une habitude dufait que ceux-ci manquent pour la plupart des clés de la connaissance en la matière. Depuis plus de 3000 ans, l'art a en fait joué un rôle majeur dans la volonté des peuples de célébrer leurs dieux, d'honorer leur religion ou de manifester leur domination et la gloire de leurs conquérants alors que désormais, il recèle souvent d'une connotation sociale ou politique. Les Egyptiens, les Perses, les Grecs puis les Romains se servirent ainsi de l'art comme d' une arme redoutable pour démontrer d'une part la supériorité de leurs dieux et d'autre part, celle de leur civilisation. Les représentations des dieux, suivies de celles de leurs gouvernants, n'avaient donc pas seulement un caractère artistique puisqu'elles servaient à conditionner leurs sujets et à les impressionner, d'ailleurs tout autant que leurs ennemis sans compter que l'art se mit aussi naturellement au service de la propagation d'une multitude de légendes. Sans les pièces de monnaies et les bustes aux effigies d'empereurs, l'histoire aurait bien été en peine de laisser des traces tangibles au bout de plusieurs siècles. Qu'aurait-on su des règnes des pharaons, des rois perses, des exploits d'Alexandre, César, Auguste et j'en passe. Qu'aurait-on pu apprendre des mœurs des Grecs ou des Romains sans les sculptures de leurs dieux, sans les vases peints de scènes mythologiques, sans les fresques de Pompéi et d'Herculanum, des bas-reliefs de nombreux temples et édifices si cela n'avait pas existé ? Pas grand chose. Ensuite, pour asseoir un peu plus sa domination en Europe, la chrétienté monopolisa complètement l'art en le mettant au service exclusif de la religion et ce, jusqu'au moment où les princes italiens cherchèrent à asseoir leur statut en faisant appel aux plus grands artistes de leur temps. Bien entendu, les rois ne furent pas en reste, Charles Quint et François 1er rivalisant sans cesse pour rendre leur règne plus éclatant. Lorsque Louis XIV fit construire Versailles, ce ne fut pas seulement pour promouvoir les arts mais aussi pour glorifier sa splendeur alors que chaque pays voisin veillait alors à assssurer le développement de son domaine culturel. Parallèlement, les gens issus de la noblesse et même de la haute bourgeoisie en vinrent aussi à s'intéresser à l'art, ce qui profita à bon nombre de créateurs à condition de demeurer plutôt obséquieux à leur égard, une règle qu'un artiste comme Rembrandt ne respecta plus après la mort de sa femme, ce qui le priva progressivement de commandes et le mena à la ruine. Au 18e siècle, des monarques comme Frédérick II de Prusse ou Catherine II de Russie donnèrent la part belle aux arts en étendant progressivement leur influence en Europe. En France, les destructions d'œuvres d'art et la dilapidation du patrimoine vendu sans regret aux enchères pour effacer toute trace de la royauté lors de la Révolution furent le résultat d'une volonté politique destinée à créer un nouveau courant. Au lieu donc de préserver nombre de chefs d'œuvre, les révolutionnaires s'évertuèrent à les remplacer par des représentations artistiques plus conformes à leurs goûts, ce qui ne les empêcha pas au passage de piller les trésors artistiques de l'Italie en imitant en cela certains ancêtres ou prédécesseurs de Louis XVI. La politique voulue par Robespierre ne dura guère, car en dehors de l'avènement du néo-classicisme, qui eut jacques-Louis David pour chef de file, la prise du pouvoir de Bonaparte devenu Napoléon empereur des Français eut pour effet de revenir en grande partie à celle du passé en mettant toutefois un accent appuyé sur le culte de la personnalité. L'avènement de la bourgeoisie imposa de nouveaux canons dans l'art après une brève immersion dans le romantisme, ce qui fit que les goûts changèrent progressivement quoique les styles restèrent liés au conformisme académique. Cela étant, il y eut un intérêt accru pour la peinture en plein air qui permit au final l'éclosion des Impressionnistes lesquels furent cependant écartés des grands salons durant de nombreuses années. Le règne de Louis-Philippe donna lieu lui aussi à un contrôle assez strict sur les arts, notamment dans le domaine des caricatures et de la photographie, tout en favorisant les goûts des bourgeois. Celui de Napoléon III ne fut guère différent avec cependant la manifestation d'un nouvel intérêt très particulier pour le monde rural et les scènes domestiques glorifiant le travail et la famille. La révolution industrielle suscita également un mouvement vers la représentation des scènes citadines et du progrès mais au plan national, tout resta consciencieusement verrouillé au point que les Impressionnistes et d'autres artistes comme Cézanne, Van Gogh, Gauguin, Toulouse-Lautrec ou même Degas durent attendre la fin du XIXe siècle pour devenir prisés en France alors qu'ils étaient déjà mieux connus dans certains pays étrangers. Ce qui se passa artistiquement en France au XIXe siècle ne fut pas totalement différent ailleurs et il fallut attendre le tournant du XXe siècle pour que les artistes se libèrent enfin des carcans de l'académisme imposé avec force dans toutes les capitales dans un but évidemment politique. Des artistes comme Cézanne avaient ouvert la voie. L'accélération du développement économique et social fit le reste. Déjà, à la fin du XIXe siècle, des artistes français, anglais, allemands et russes avaient choisi de traiter le thème du monde ouvrier sortant d'une sorte d'esclavagisme sous la houlette de syndicats nouvellement créés alors que le mouvement anarchiste ne manqua pas d'attirer certains d'entre eux. Le début du XXe siècle fut tonitruant pour les arts après l'émergence de nombreux mouvements ayant suivi l'Impressionnisme. Il y eut les Nabis puis les Fauves, les Expressionnistes et les Cubistes qui imposèrent leur présence brutalement au grand dam des tenants de l'académisme qui n'avaient cependant pas désarmé si on en juge par les nombreux articles virulents qui fleurirent avant 1914. Il convient de souligner que dès 1900, l'Europe était comme une cocotte-minute laissée sur le feu qui allait exploser un jour ou l'autre sous la pression des masses populaires fatiguées de demeurer sous la férule de monarques décadents, comme ce fut surtout le cas en Russie. Il y eut donc une brèche par laquelle s'engouffrèrent nombre de mouvements artistiques qui ne demandaient qu'à s'exprimer librement alors que la France était de son côté soumise à une instabilité d'un autre ordre due à des changements de gouvernement répétés, à la séparation de l'Eglise et de l'Etat, à l'affaire Dreyfus, qui divisa le pays et donc nombre d'artistes, à la modernisation et au désir constant de revanche contre les Prussiens. Le levier politique en art était devenu bien moins fermement tenu depuis la chute de Napoléon III, ce qui n'était pas le cas en Allemagne ou encore moins en Russie où la révolution était en train de germer. Durant le dernier quart du XIXe siècle, les seul cas patents qu'on puisse signaler, en dehors des caricatures de la presse, avaient été la mise en exergue de Jeanne d'Arc, une héroïne surgie du passé et hautement idéalisée et les scènes militaires rappelant un glorieux passé, ce qui permit à des artistes comme Meissonnier de recevoir des commandes plutôt princières de la part de l'Etat. Toutefois, dès le début du XXe siècle, le registre patriotique avait fini par s'appauvrir étrangement alors que la guerre pointait, ce qui démontre que les mœurs avaient changé et que le progrès, devenu vertigineux, avait bousculé des traditions solidement ancrées auparavant. On imagine mal à quel point un mouvement comme le Cubisme prit de court les gouvernants de l'époque qui semblèrent figés dans des convictions surannées au sujet de l'utilisation des arts dans leur politique. C'était comme si ceux-ci n'avaient rien vu ou fait en sorte d'ignorer ce qui se passait, ce qui permit par contre aux artistes de se montrer plus libres et plus audacieux quand bien même ils pouvaient être traités de fous mais ce ras-le-bol manifesté au sein des académies, qui fit longtemps rire les gens bien-pensants, devait finir par emporter tout sur son passage une fois la guerre survenue. Les souffrances, les destructions, les excès du capitalisme eurent raison des pouvoirs en place en Russie et en Allemagne où l'art se transforma en instrument de propagande pour les nouveaux maîtres du Kremlin et pour ceux qui tentèrent d'instaurer une nouvelle ère révolutionnaire à Berlin. Les entreprises des uns n'eurent cependant pas des résultats identiques pour les autres, les héritiers de Lénine parvenant à museler les arts à leur seul profit alors que les partisans de Karl Liebknecht et de Rosa Luxemburg allèrent à l'échec en laissant leur pays tomber ensuite sous le joug des nazis qui, eux, ne se privèrent guère de remettre de l'ordre à leur façon en imposant un art strictement national-socialiste. En France, la période de l'entre deux guerres fut propice au développement de nombre de courants artistiques, les Français voulant surtout panser les plaies du conflit au point de se laisser bercer dans un pacifisme de bon aloi, ce qui n'empêcha pas la presse française de manifester de plus en plus sa xénophobie à l'encontre de centaines d'artistes venus travailler à Paris, considérée alors comme une ville lumière. Ce n'était plus la police qui veillait au grain ni les jurys des Salons qui s'érigeaient en censeurs mais plutôt la presse dont les articles prirent un tour plus que scabreux au milieu des années 1930, préparant ainsi inconsciemment le terrain pour les rafles et les persécutions qui allaient survenir durant l'Occupation. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, alors que la propagande soviétique battait son plein à travers des œuvres glorifiant Staline et les acquis ou bienfaits du Communisme, ce fut au tour des Etats-Unis d'utiliser les arts pour mettre leur culture en avant. Comment ? Tout simplement en faisant campagne contre les artistes européens, tous plus ou moins suspectés d'être liés aux communistes, ce qui amena la CIA à inciter les musées et les grandes galeries d'outre-Atlantique de faire avant tout la promotion d'artistes américains, d'où l'émergence brutale des Expressionnistes-Abstraits sur le marché. Sur ce point, peu de gens ont idée de l'étendue d'une pareille campagne qui eut pour effet d'ostraciser les artistes européens et de donner ainsi la primauté à l'art moderne américain sur le marché de l'art. on ne peutq ue le constater aujourd'hui. Pour en revenir à la France, il ne se passa pratiquement rien jusqu'à la fin de la IVe République surtout que les différents gouvernements étaient occupés à accélérer la reconstruction et la modernisation du pays tout en étant confrontés à la guerre en Indochine et à l'instabilité en Algérie. Ce ne fut donc qu'avec l'arrivée de De Gaulle au pouvoir et la nomination d'André Malraux au ministère de la Culture que les choses commencèrent un peu à bouger sauf que Paris était déjà entrain de perdre son statut de premier centre d'art du monde au profit de New York. Il fallut cependant attendre le septennat de Georges Pompidou pour assister à un réel changement, ce dernier accordant enfin une place plus visible aux arts et désirant laisser une trace de son passage avec la création du Centre Beaubourg qui porte son nom sans oublier la mise en activation de centres régionaux d'art qui permirent à de nombreux artistes de se faire connaître ou du moins subsister. Elu Président ,Giscard d'Estaing fut un peu plus frileux que son prédécesseur alors que François Mitterrand puis Jacques Chirac se montrèrent enfin plus entreprenants pour leur part en favorisant le développement des arts et la construction de musées ou d'édifices majeurs. L'art au service de la politique n'a donc pas été un fait mineur au XXe siècle, bien au contraire, puisque Mao Tsé Toung en fit un instrument incontournable du Communisme en Chine, imité en cela par ceux qui prirent le pouvoir au Vietnam et d'autres pays communistes comme Cuba. Il n' y eut qu'une exception de taille avant la fin de cette ère :le Cambodge où le régime de Pol Pot ignora la portée de cette arme de choix en s'évertuant a-contrario à effacer les traces de la culture khmère pour se livrer à la politique du génocide afin de créer une nouvelle civilisation. Au début du 21e siècle, l'émergence des Talibans en Afghanistan fut à nouveau la cause d'un désastre culturel avec la destruction ordonnée par ces derniers d'immenses statues de Bouddha, vestiges d'une civilisation haïe par les islamistes. C'est dire à quel point l'art a été redoutable comme instrument jusqu'à devenir dérangeant. Aujourd'hui, ce sont les artistes qui se servent de plus en plus de l'art comme instrument politique. En cela, ils sont les héritiers des Dadaïstes qui manifestèrent des idées plutôt anarchistes à la fin des années 1910 puis des Surréalistes qui se moquèrent de la société et tentèrent de donner au rêve une place marquante dans leurs œuvres sans cependant éviter un côté morbide et désabusé.Il y eut aussi Wifedro Lam et d'autres artistes pour manifester un sentiment politique dans leurs œuvres sans oublier également les créateurs du Pop Art ou du Nouveau Réalisme qui dénoncèrent la société de consommation à divers degrés. Aujourd'hui donc, les connotations politiques, humaines, sociales et autres sont de plus en plus présentes dans les œuvres parce que d'une part, le thème de la religion semble dépassé ou qu'il vire vers de nouvelles interprétations, comme celle de la kabbale, ainsi que vers d'autres préoccupations actuelles comme l'obscurantisme et que d'autre part, les problèmes majeurs de notre temps, comme la mondialisation, ont fini par occuper et même tourmenter les esprits, ce qui démontre que l'homme a décidé de se prendre en main et que les régimes en place dans le monde ont de moins en moins la possibilité de monopoliser les arts. Par contre, il est devenu patent que les grandes maisons de vente ont développé une politique de promotion à outrance de l'art contemporain au point de bouleverser les donnes sur le marché et de réduire le rôle que tenaient les grandes galeries jusqu' à la fin des années 1980. Finalement, si l'art n'est plus l'instrument politique tel qu'on l'a conçu jusqu'à la fin de la guerre froide opposant deux blocs bien définis, c'est parce que ce changement de situation est dû essentiellement au progrès qui fait que les distances sont raccourcies, aux rapports entre humains qui se sont multipliés rapidement, aux mouvements migratoires qui ne sont plus jugulés, au brassage constant des populations et au fait que le monde est devenu bien plus instable. Or, qui dit instabilité dit préoccupation, ce qui fait que les artistes, en plus de leur talent, ont fini par posséder la faculté de voir le monde à leur façon, à travers justement leurs préoccupations, notamment comme Anselm Kiefer, qui a ressassé le thème de la culpabilité allemande concernant l'Holocauste, un drame qu'il a maintes fois mis en scène. Ce qui fait que l'art est le miroir de nos propres interrogations, que l'on s'en aperçoive ou non. Adrian Darmon
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Les gens contemplent en général une œuvre d'art enfonction de son attrait esthétique en se demandant rarement si elle a ou a eu une signification autre qu'artistique, ce qui est somme toute une habitude dufait que ceux-ci manquent pour la plupart des clés de la connaissance en la matière. Depuis plus de 3000 ans, l'art a en fait joué un rôle majeur dans la volonté des peuples de célébrer leurs dieux, d'honorer leur religion ou de manifester leur domination et la gloire de leurs conquérants alors que désormais, il recèle souvent d'une connotation sociale ou politique. Les Egyptiens, les Perses, les Grecs puis les Romains se servirent ainsi de l'art comme d' une arme redoutable pour démontrer d'une part la supériorité de leurs dieux et d'autre part, celle de leur civilisation. Les représentations des dieux, suivies de celles de leurs gouvernants, n'avaient donc pas seulement un caractère artistique puisqu'elles servaient à conditionner leurs sujets et à les impressionner, d'ailleurs tout autant que leurs ennemis sans compter que l'art se mit aussi naturellement au service de la propagation d'une multitude de légendes. Sans les pièces de monnaies et les bustes aux effigies d'empereurs, l'histoire aurait bien été en peine de laisser des traces tangibles au bout de plusieurs siècles. Qu'aurait-on su des règnes des pharaons, des rois perses, des exploits d'Alexandre, César, Auguste et j'en passe. Qu'aurait-on pu apprendre des mœurs des Grecs ou des Romains sans les sculptures de leurs dieux, sans les vases peints de scènes mythologiques, sans les fresques de Pompéi et d'Herculanum, des bas-reliefs de nombreux temples et édifices si cela n'avait pas existé ? Pas grand chose. Ensuite, pour asseoir un peu plus sa domination en Europe, la chrétienté monopolisa complètement l'art en le mettant au service exclusif de la religion et ce, jusqu'au moment où les princes italiens cherchèrent à asseoir leur statut en faisant appel aux plus grands artistes de leur temps. Bien entendu, les rois ne furent pas en reste, Charles Quint et François 1er rivalisant sans cesse pour rendre leur règne plus éclatant. Lorsque Louis XIV fit construire Versailles, ce ne fut pas seulement pour promouvoir les arts mais aussi pour glorifier sa splendeur alors que chaque pays voisin veillait alors à assssurer le développement de son domaine culturel. Parallèlement, les gens issus de la noblesse et même de la haute bourgeoisie en vinrent aussi à s'intéresser à l'art, ce qui profita à bon nombre de créateurs à condition de demeurer plutôt obséquieux à leur égard, une règle qu'un artiste comme Rembrandt ne respecta plus après la mort de sa femme, ce qui le priva progressivement de commandes et le mena à la ruine. Au 18e siècle, des monarques comme Frédérick II de Prusse ou Catherine II de Russie donnèrent la part belle aux arts en étendant progressivement leur influence en Europe. En France, les destructions d'œuvres d'art et la dilapidation du patrimoine vendu sans regret aux enchères pour effacer toute trace de la royauté lors de la Révolution furent le résultat d'une volonté politique destinée à créer un nouveau courant. Au lieu donc de préserver nombre de chefs d'œuvre, les révolutionnaires s'évertuèrent à les remplacer par des représentations artistiques plus conformes à leurs goûts, ce qui ne les empêcha pas au passage de piller les trésors artistiques de l'Italie en imitant en cela certains ancêtres ou prédécesseurs de Louis XVI. La politique voulue par Robespierre ne dura guère, car en dehors de l'avènement du néo-classicisme, qui eut jacques-Louis David pour chef de file, la prise du pouvoir de Bonaparte devenu Napoléon empereur des Français eut pour effet de revenir en grande partie à celle du passé en mettant toutefois un accent appuyé sur le culte de la personnalité. L'avènement de la bourgeoisie imposa de nouveaux canons dans l'art après une brève immersion dans le romantisme, ce qui fit que les goûts changèrent progressivement quoique les styles restèrent liés au conformisme académique. Cela étant, il y eut un intérêt accru pour la peinture en plein air qui permit au final l'éclosion des Impressionnistes lesquels furent cependant écartés des grands salons durant de nombreuses années. Le règne de Louis-Philippe donna lieu lui aussi à un contrôle assez strict sur les arts, notamment dans le domaine des caricatures et de la photographie, tout en favorisant les goûts des bourgeois. Celui de Napoléon III ne fut guère différent avec cependant la manifestation d'un nouvel intérêt très particulier pour le monde rural et les scènes domestiques glorifiant le travail et la famille. La révolution industrielle suscita également un mouvement vers la représentation des scènes citadines et du progrès mais au plan national, tout resta consciencieusement verrouillé au point que les Impressionnistes et d'autres artistes comme Cézanne, Van Gogh, Gauguin, Toulouse-Lautrec ou même Degas durent attendre la fin du XIXe siècle pour devenir prisés en France alors qu'ils étaient déjà mieux connus dans certains pays étrangers. Ce qui se passa artistiquement en France au XIXe siècle ne fut pas totalement différent ailleurs et il fallut attendre le tournant du XXe siècle pour que les artistes se libèrent enfin des carcans de l'académisme imposé avec force dans toutes les capitales dans un but évidemment politique. Des artistes comme Cézanne avaient ouvert la voie. L'accélération du développement économique et social fit le reste. Déjà, à la fin du XIXe siècle, des artistes français, anglais, allemands et russes avaient choisi de traiter le thème du monde ouvrier sortant d'une sorte d'esclavagisme sous la houlette de syndicats nouvellement créés alors que le mouvement anarchiste ne manqua pas d'attirer certains d'entre eux. Le début du XXe siècle fut tonitruant pour les arts après l'émergence de nombreux mouvements ayant suivi l'Impressionnisme. Il y eut les Nabis puis les Fauves, les Expressionnistes et les Cubistes qui imposèrent leur présence brutalement au grand dam des tenants de l'académisme qui n'avaient cependant pas désarmé si on en juge par les nombreux articles virulents qui fleurirent avant 1914. Il convient de souligner que dès 1900, l'Europe était comme une cocotte-minute laissée sur le feu qui allait exploser un jour ou l'autre sous la pression des masses populaires fatiguées de demeurer sous la férule de monarques décadents, comme ce fut surtout le cas en Russie. Il y eut donc une brèche par laquelle s'engouffrèrent nombre de mouvements artistiques qui ne demandaient qu'à s'exprimer librement alors que la France était de son côté soumise à une instabilité d'un autre ordre due à des changements de gouvernement répétés, à la séparation de l'Eglise et de l'Etat, à l'affaire Dreyfus, qui divisa le pays et donc nombre d'artistes, à la modernisation et au désir constant de revanche contre les Prussiens. Le levier politique en art était devenu bien moins fermement tenu depuis la chute de Napoléon III, ce qui n'était pas le cas en Allemagne ou encore moins en Russie où la révolution était en train de germer. Durant le dernier quart du XIXe siècle, les seul cas patents qu'on puisse signaler, en dehors des caricatures de la presse, avaient été la mise en exergue de Jeanne d'Arc, une héroïne surgie du passé et hautement idéalisée et les scènes militaires rappelant un glorieux passé, ce qui permit à des artistes comme Meissonnier de recevoir des commandes plutôt princières de la part de l'Etat. Toutefois, dès le début du XXe siècle, le registre patriotique avait fini par s'appauvrir étrangement alors que la guerre pointait, ce qui démontre que les mœurs avaient changé et que le progrès, devenu vertigineux, avait bousculé des traditions solidement ancrées auparavant. On imagine mal à quel point un mouvement comme le Cubisme prit de court les gouvernants de l'époque qui semblèrent figés dans des convictions surannées au sujet de l'utilisation des arts dans leur politique. C'était comme si ceux-ci n'avaient rien vu ou fait en sorte d'ignorer ce qui se passait, ce qui permit par contre aux artistes de se montrer plus libres et plus audacieux quand bien même ils pouvaient être traités de fous mais ce ras-le-bol manifesté au sein des académies, qui fit longtemps rire les gens bien-pensants, devait finir par emporter tout sur son passage une fois la guerre survenue. Les souffrances, les destructions, les excès du capitalisme eurent raison des pouvoirs en place en Russie et en Allemagne où l'art se transforma en instrument de propagande pour les nouveaux maîtres du Kremlin et pour ceux qui tentèrent d'instaurer une nouvelle ère révolutionnaire à Berlin. Les entreprises des uns n'eurent cependant pas des résultats identiques pour les autres, les héritiers de Lénine parvenant à museler les arts à leur seul profit alors que les partisans de Karl Liebknecht et de Rosa Luxemburg allèrent à l'échec en laissant leur pays tomber ensuite sous le joug des nazis qui, eux, ne se privèrent guère de remettre de l'ordre à leur façon en imposant un art strictement national-socialiste. En France, la période de l'entre deux guerres fut propice au développement de nombre de courants artistiques, les Français voulant surtout panser les plaies du conflit au point de se laisser bercer dans un pacifisme de bon aloi, ce qui n'empêcha pas la presse française de manifester de plus en plus sa xénophobie à l'encontre de centaines d'artistes venus travailler à Paris, considérée alors comme une ville lumière. Ce n'était plus la police qui veillait au grain ni les jurys des Salons qui s'érigeaient en censeurs mais plutôt la presse dont les articles prirent un tour plus que scabreux au milieu des années 1930, préparant ainsi inconsciemment le terrain pour les rafles et les persécutions qui allaient survenir durant l'Occupation. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, alors que la propagande soviétique battait son plein à travers des œuvres glorifiant Staline et les acquis ou bienfaits du Communisme, ce fut au tour des Etats-Unis d'utiliser les arts pour mettre leur culture en avant. Comment ? Tout simplement en faisant campagne contre les artistes européens, tous plus ou moins suspectés d'être liés aux communistes, ce qui amena la CIA à inciter les musées et les grandes galeries d'outre-Atlantique de faire avant tout la promotion d'artistes américains, d'où l'émergence brutale des Expressionnistes-Abstraits sur le marché. Sur ce point, peu de gens ont idée de l'étendue d'une pareille campagne qui eut pour effet d'ostraciser les artistes européens et de donner ainsi la primauté à l'art moderne américain sur le marché de l'art. on ne peutq ue le constater aujourd'hui. Pour en revenir à la France, il ne se passa pratiquement rien jusqu'à la fin de la IVe République surtout que les différents gouvernements étaient occupés à accélérer la reconstruction et la modernisation du pays tout en étant confrontés à la guerre en Indochine et à l'instabilité en Algérie. Ce ne fut donc qu'avec l'arrivée de De Gaulle au pouvoir et la nomination d'André Malraux au ministère de la Culture que les choses commencèrent un peu à bouger sauf que Paris était déjà entrain de perdre son statut de premier centre d'art du monde au profit de New York. Il fallut cependant attendre le septennat de Georges Pompidou pour assister à un réel changement, ce dernier accordant enfin une place plus visible aux arts et désirant laisser une trace de son passage avec la création du Centre Beaubourg qui porte son nom sans oublier la mise en activation de centres régionaux d'art qui permirent à de nombreux artistes de se faire connaître ou du moins subsister. Elu Président ,Giscard d'Estaing fut un peu plus frileux que son prédécesseur alors que François Mitterrand puis Jacques Chirac se montrèrent enfin plus entreprenants pour leur part en favorisant le développement des arts et la construction de musées ou d'édifices majeurs. L'art au service de la politique n'a donc pas été un fait mineur au XXe siècle, bien au contraire, puisque Mao Tsé Toung en fit un instrument incontournable du Communisme en Chine, imité en cela par ceux qui prirent le pouvoir au Vietnam et d'autres pays communistes comme Cuba. Il n' y eut qu'une exception de taille avant la fin de cette ère :le Cambodge où le régime de Pol Pot ignora la portée de cette arme de choix en s'évertuant a-contrario à effacer les traces de la culture khmère pour se livrer à la politique du génocide afin de créer une nouvelle civilisation. Au début du 21e siècle, l'émergence des Talibans en Afghanistan fut à nouveau la cause d'un désastre culturel avec la destruction ordonnée par ces derniers d'immenses statues de Bouddha, vestiges d'une civilisation haïe par les islamistes. C'est dire à quel point l'art a été redoutable comme instrument jusqu'à devenir dérangeant. Aujourd'hui, ce sont les artistes qui se servent de plus en plus de l'art comme instrument politique. En cela, ils sont les héritiers des Dadaïstes qui manifestèrent des idées plutôt anarchistes à la fin des années 1910 puis des Surréalistes qui se moquèrent de la société et tentèrent de donner au rêve une place marquante dans leurs œuvres sans cependant éviter un côté morbide et désabusé.Il y eut aussi Wifedro Lam et d'autres artistes pour manifester un sentiment politique dans leurs œuvres sans oublier également les créateurs du Pop Art ou du Nouveau Réalisme qui dénoncèrent la société de consommation à divers degrés. Aujourd'hui donc, les connotations politiques, humaines, sociales et autres sont de plus en plus présentes dans les œuvres parce que d'une part, le thème de la religion semble dépassé ou qu'il vire vers de nouvelles interprétations, comme celle de la kabbale, ainsi que vers d'autres préoccupations actuelles comme l'obscurantisme et que d'autre part, les problèmes majeurs de notre temps, comme la mondialisation, ont fini par occuper et même tourmenter les esprits, ce qui démontre que l'homme a décidé de se prendre en main et que les régimes en place dans le monde ont de moins en moins la possibilité de monopoliser les arts. Par contre, il est devenu patent que les grandes maisons de vente ont développé une politique de promotion à outrance de l'art contemporain au point de bouleverser les donnes sur le marché et de réduire le rôle que tenaient les grandes galeries jusqu' à la fin des années 1980. Finalement, si l'art n'est plus l'instrument politique tel qu'on l'a conçu jusqu'à la fin de la guerre froide opposant deux blocs bien définis, c'est parce que ce changement de situation est dû essentiellement au progrès qui fait que les distances sont raccourcies, aux rapports entre humains qui se sont multipliés rapidement, aux mouvements migratoires qui ne sont plus jugulés, au brassage constant des populations et au fait que le monde est devenu bien plus instable. Or, qui dit instabilité dit préoccupation, ce qui fait que les artistes, en plus de leur talent, ont fini par posséder la faculté de voir le monde à leur façon, à travers justement leurs préoccupations, notamment comme Anselm Kiefer, qui a ressassé le thème de la culpabilité allemande concernant l'Holocauste, un drame qu'il a maintes fois mis en scène. Ce qui fait que l'art est le miroir de nos propres interrogations, que l'on s'en aperçoive ou non. Adrian Darmon
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