Le développement spectaculaire du marché de l'art a récemment entraîné l'arrivée de nouveaux courtiers issus de grandes maisons de vente possédant un importtant carnet d'adresses de collectionneurs richissimes.
Directrice du département de l'art d'après-guerre et contemporain chez Christie's, Amy Cappellazzo a ainsi quitté cette maison de vente pour ouvrir son bureau de courtage en imitant Tobias Meyer, le maestro du marteau chez Sotheby's qui avait abandonné son poste pour faire cavalier seul.
Guy Bennett, un ancien expert chez Christie's est devenu pour sa part le conseiller du musée du Qatar et de Sheikha al Mayassa bint Hamad bin Khalifa al-Thani, sa présidente.
Durant des décennies, les conseillers en achats d'art ne constituaient qu'un petit club très fermé en se chargeant de monter des collections pour de riches amateurs jusqu'au moment où le marché a commencé à se créer véritablementr à la fin des années 1970. A partir de là, leur nombre a évolué lentement jusqu'au début des années 2000 puis explosé avec l'émergence de nouveaux millionnaires en Russie et en Asie ainsi que ceux issus du monde de la finance.
Ne connaissant pas grand chose en matière d'art, ces nouveaux riches ont éprouvé le besoin de recourir à des conseillers ayant fait leurs armes au sein de grandes maisons de vente en suscitant par la même occasion une véritable ruée vers l'or dans un domaine en pleine expansion et ce, au grand dam des courtiers de la première heure qui ont eu du mal à suivre le mouvement en se retrouvant confrontés à des rivaux aux dents longues.
La lutte pour attirer à soi de riches collectionneurs est ainsi devenue sans pitié avec des pratiques agressives et pas toujours loyales vu l'importance des commissions à prendre sur les transactions en privé ce qui n'a pas manqué d'inquiéter les vétérans du courtage qui ont estimé que les nouveaux venus dans le métier poussaient les choses un peu trop loin jusqu'à menacer l'intégrité de la profession comme on l'a constaté récemment avec l'affaire Bouvier.
Ces derniers sont souvent regardés comme des mercenaires alors que leur métier qui n'est régi par aucune règle compte désormais plus de 150 courtiers à travers la planète sauf que nombre de ceux-ci n'agissent plus comme de simples conseillers pour se comporter comme des marchands surtout que certains sont issus du monde des finances sans être de véritables spécialistes en oeuvres d'art, ce qui n'est pas surprenant étant donné le parcours professionnel des nouveaux collectionneurs qui considèrent l'art comme un produit financier.
En général, les courtiers prennent sur chaque transaction une commission variant entre 5 et 10%, ce qui n'est pas négligeable lorsque les prix de vente dépassent un million de dollars et les plus performants vont jusqu'à gagner plus de 20 millions par an, ce qui à de quoi rendre jaloux un spécialiste patenté d'une grande maison dont le salaire annuel de base n'est que de 350 000 dollars avec un maximum d'un million suivant l'apport de primes.
Sur un tableau vendu à 10 millions de dollars, un courtier peut prendre une commission minimum de 500 000 alors que chez Christie's un spécialiste ne recevra qu'un petit pourcentage sur cette dernière somme.
En attendant, les grandes maisons de vente s'inquiètent de voir leurs experts les quitter pour monter leur propre affaire surtout que la demande des acheteurs pour obtenir l'aide de conseillers en achats d'art ne cesse de grimper tandis que les meilleurs sont de plus en plus courtisés par de riches amateurs sans compter que de nombreux galeristes se sont mis de la partie pour attirer des collectionneurs.
La compétition est donc devenue rude entre les maisons de vente et ces courtiers qui tentent de séduire ces collectionneurs avec des méthodes agressives tandis que ceux issus des grandes maisons de vente font preuve de plus de rigueur dans leur nouveau métier en ayant l'avantage de posséder de beaux carnets d'adresses pour trouver des oeuvres de grande qualité.
De toute évidence, il y aura un écrémage qui laissera en place les meilleurs éléments qui seront peut-être ensuite tentés de se transformer en marchands mais pour le moment l'augmentation impressionnante du nombre des courtiers ne laisse pas d'inquiéter surtout que ceux venus du monde de la finance ne sont pas de grands spécialistes en matière d'art mais plutôt des affairistes qui se permettent de demander des commissions aux vendeurs autant qu'aux acheteurs, ce qui n'est pas une pratique appréciée par la crème de la profession.