Représentant du mouvement minimaliste et considéré comme
l'un des artistes américains les plus influents de son époque, Ellsworth Kelly
est décédé à Spencertown à l'âge de 92 ans.
Né le 31 mai 1923 à Newburgh, près de New York, Ellsworth
Kelly avait nourri une passion pour les oiseaux et leurs couleurs durant son
enfance qu'il passa en solitaire avant de s'intéresser à l'art malgré
l'opposition de ses parents.
Il étudia au Pratt Institute de New York à partir de 1941
puis rejoignit l'armée en janvier 1943 où il intégra une section de camouflage
dans le Colorado puis dans le Maryland dans une unité spécialisée dans la
fabrication de faux tanks et camions destinés à tromper les forces allemandes
en Europe.
De 1946 à 1947, Kelly étudia à l'école du Musée des
Beaux-Arts de Boston puis l'année suivante à l'Ecole nationale des Beaux-Arts à
Paris où il se lia d'amitié avec les artistes John Cage et Merce Cunningham qui
s'étaient investis dans la musique et la danse.
A Paris, Kelly visita les ateliers d'Alberto Giacometti,
Alberto Magnelli, Francis Picabia et Georges Vantongerloo en retenant les
leçons de leurs travaux avant de retourner en 1954 aux Etats-Unis où il
s'intéressa aux oeuvres d'Ad Reinhardt en ayant cependant des difficultés à
s'intégrer dans le monde artistique new-yorkais.
En mai 1956, il eut droit à sa première exposition à la
galerie Betty Parsons mais son art fut à cette époque considéré comme européen.
L'année suivante, trois de ses oeuvres titrées "Atlantic", "Bar"
et "Painting in Three Panels" furent présentées au Whitney Museum
lors d'une exposition intitulée "Young
America 1957".
Ayant travaillé un temps dans
un atelier de l'Hôtel des Artistes de New York, Kelly s'installa en 1970 à
Spencertown en compagnie de son compagnon, le photographe Jack Shear qui devint
le directeur de la fondation portant son nom.
A Paris, Kelly avait d'abord
produit des oeuvres figuratives avant de verser dans l'abstraction en 1949 en
produisant des oeuvres inspirées par la réflexion de la lumière sur l'eau
comme "Seine" (1950), une toile faite de rectangles noirs et blancs
placés au hasard.
En 1951, il réalisa une série
de huit collages intitulées "Spectres de couleurs placés au hasard"
en employant pour chacun un procédé différent avant de définir une peinture
plus libre sous l'influence des oeuvres tardives de Claude Monet en explorant
le concept du monochrome produit en séries avant de se soucier des formes et
des masses planes en créant un pont entre la peinture géométrique américaine
des années 1930 et les débuts du minimalisme des années 1940.
Durant les années 1960, Kelly
produisit des oeuvres sur des toiles aux angles irréguliers comme avec
"Yellow Piece" (1960), la toile elle-même devenant une composition
sur le mur devenu un arrière-plan.
Durant les années 1970, il
employa des formes courbées ou triangulaires en opposant deux toiles peintes en
monochrome pour créer de nouvelles formes géométriques.
En s'installant à Spencertown
en 1970, Kelly loua un ancien théâtre dans la ville voisine de Chatham où il
créa une série de 14 toiles de différentes couleurs en insistant sur leurs
contrastes puis il en réalisa d'autres en utilisant deux couleurs sur des
panneaux séparés tout en poursuivant ses recherches tout au long de sa carrière
en plaçant une toile noire au-dessus d'une blanche avec l'envie d'opposer le
chaos du quotidien pour capturer la réalité dans une quête absolue de
perception.
Kelly avait produit des dessins
de plantes et de fleurs à la fin des années 1940 en subissant l'influence de
Matisse et de Hans Arp à Paris ainsi que des gravures au milieu des années 1960
qui furent notamment éditées par la galerie Maeght en poursuivant une
production intense durant les années 1970.
Il s'adonna également à la
sculpture en produisant des oeuvres sur bois à partir de 1958 puis des
sculptures monumentales en forme de totem en acier, aluminium ou bronze à partir de 1973, des
oeuvres carrément minimalistes.
Kelly fut un artiste à part
dans le monde artistique américain en recherchant avant tout la perfection à
travers la construction et la déconstruction des formes et des couleurs où on perçoit
l'influence de Matisse, de Picasso et de Mondrian.