L'histoire l'art est un sujet plutôt délaissé dans les collèges et lycées de France à une époque où la société a été soumise à de graves clivages qui ont engendré d'inquiétantes dérives au sein des populations des cités les plus défavorisées.
Ce n'est pas seulement la laïcité qui été remise en cause ces derniers temps mais aussi la notion du vivre ensemble qui a longtemps été un facteur de stabilité alors que le chômage et la crainte du lendemain ont fait perdre l'espoir d'une vie meilleure à de nombreux jeunes.
Mais déjà, ne pas s'offrir une solide éducation constitue un handicap majeur pour tout adolescent à l'orée de sa vie d'adulte qui risquera alors de verser dans la contestation des normes imposées par la démocratie tandis que les plus faibles d'esprit finiront par s'enfoncer dans une attitude nihiliste pour faire alors face à la triste éventualité de s'exclure de la société.
La violence n'a jamais été une solution adéquate alors que l'homme porte en lui des valeurs qui ont permis à l'histoire de l'humanité d'avancer mais on ne niera toutefois pas qu'il a toujours oscillé entre le noir et le blanc depuis des millénaires pour se retrouver confronté à des situations souvent désastreuses.
Au temps de la préhistoire, l'homme tentait de vivre avec les moyens du bord mais déjà, il avait déjà exploité un rare talent artistique en laissant derrière lui sur les parois de nombreuses cavernes des signes et des représentations d'animaux qui sont aujourd'hui des témoignages très émouvants.
En reproduisant ces images avec art, les hommes préhistoriques avaient donc exprimé une rare sensibilité en essayant de sonder les mystères du monde dans lequel ils vivaient et de diffuser leurs croyances en considérant vraisemblablement ces animaux comme des dieux, une thématique reprise plus tard par les Sumériens, les Egyptiens, les Grecs et les Romains avant l'apparition du monothéisme.
Dans l'antiquité, l'art était la quintessence de ce pouvait produire le génie humain, une belle manifestation que les religions ne se privèrent pas de poursuivre via l'édification d'églises et la glorification du Christ, de la Vierge et des saints en peinture.
La Renaissance remit le portrait et les scènes mythologiques à l'honneur tandis que les princes et les rois firent de l'art l'instrument de leur pouvoir avant l'arrivée des bourgeois collectionneurs et des intellectuels de la fin du 19e et du début du 20e siècle qui favorisèrent le développement de l'art alors que le public avait fini par se prendre d'engouement pour les musées nouvellement créés.
Instrument des croyances, l'art est donc progressivement devenu esthétique et représentatif des styles qui se sont succédé durant des siècles depuis l'époque antique jusqu'à nos jours. Ainsi, c'est l'art qui symbolise souvent les étapes de l'histoire et après avoir été capté par les plus nantis, il est devenu universel, ce qui signifie à tout le moins qu'il représente un rempart plus que nécessaire contre l'obscurantisme.
Nous allons ainsi au musée pour admirer les plus belles oeuvres de l'histoire de l'humanité pour comprendre son cheminement, constater les transformations au fil des décennies, réfléchir aux progrès accomplis par les artistes et s'interroger par ricochet sur notre devenir personnel.
Ne pas étudier l'histoire de l'art, c'est se priver d'appréhender notre propre histoire, ne pas s'y intéresser, c'est aussi ne rien comprendre au monde qui nous entoure et pour certains, c'est venir à nier les apports des civilisations qui nous ont précédés, comme Daech a osé le faire en Syrie ou en Irak.
Etudier le classicisme, l'impressionnisme, le Cubisme, l'Expressionnisme, l'Abstraction ou le Minimalisme, c'est par contre s'offrir la possibilité de comprendre les bouleversements auxquels le monde a été soumis et d'avoir l'avantage de ne pas être un ignare en remarquant au passage que l'art de la préhistoire a été bizarrement à la base de tout ce qui a été accompli jusqu'à présent.
Sur les parois des cavernes, le figuratif, splendide à maints égards, côtoie l'abstraction. Avec les sculptures de l'antiquité on se surprend à deviner quelle fut l'inspiration de Michel-Ange. Sur des tableaux du Moyen-Âge, le Cubisme est déjà sous-jacent. Avec la Joconde on découvre la volonté manifeste de Vinci de la rendre vivante. Avec les portraits de Holbein l'hyperréalisme se révèle et avec les paysages de Turner, l'Impressionnisme est en marche.
Pour les connaisseurs, acheter de l'art est une façon de traduire esthétiquement leur savoir et pour les nantis, un moyen d'affirmer leur réussite mais pour les jeunes, l'art ne dit souvent pas grand chose sauf qu'ils ignorent qu'ils baignent constamment dans un univers artistique, visible à travers les architectures des villes, la forme des voitures qui y circulent, le Design du mobilier domestique ou urbain et même la conception de leurs jeux vidéo.
Ceux-ci n'ont pour la plupart pas pu instiller dans leur esprit que l'art était omniprésent dans leur vie, ce qu'il leur ferait appréhender les choses autrement au lieu d'avoir la tête farcie de préjugés basés sur de fausses opinions. En fait, l'art est la conjugaison de différences permettant d'apprécier la variété des créations. On peut ainsi aimer le figuratif et détester l'abstrait et vice-versa sans compter que la B.D qui leur plait a intégré le domaine de l'art et que certains jeunes des cités ont annexé l'art de la rue pour produire des images qui sont le reflet de leurs préoccupations.
Au lieu de cela, nombre d'entre eux se laissent envahir par des idées faites souvent de toutes pièces en cédant au communautarisme et en se souciant par exemple du sort du peuple palestinien avec pour résultat néfaste de nier l'Holocauste de la Seconde Guerre Mondiale, de plus en plus difficile à enseigner dans les classes, et de participer à la propagation d'une haine antisémite des plus virulentes.
Il va de soi qu'on peut s'opposer aux injustices comme les générations précédentes l'ont fait mais il est inconcevable d'importer en France des conflits se passant à l'étranger qui finissent par y créer des tensions raciales pour inciter certains jeunes à se mettre à l'écart de la République.
On en revient donc au vivre ensemble qui implique le respect de l'autre mais faute de manifester du bon sens et un intérêt pour l'art, de nombreux adolescents risquent eux-même de s'exclure de la société dans laquelle ils vivent sans pouvoir se nourrir de cette fraternité tant souhaitée pour le bien commun.
Pourtant, si on demande à des collégiens de dire qu'ils connaissent des hommes politiques ou penseurs tels que Dante, Erasme, Luther, Necker, Guizot, Gambetta, Poincaré, Mac Arthur, Coty, Ford et j'en passe, ils répondront pour la plupart ne pas en avoir entendu parler mais si par contre, si on évoque les noms d'artistes comme Van Gogh, Matisse ou Picasso, ils sauront à coup sûr s'en rappeler.
En conclusion, l'art a rythmé la vie de chaque pays du monde depuis des temps immémoriaux et ce, selon des modes suivies ça et là, qu'elles aient été religieuses ou profanes alors que depuis le début du XXe siècle, il s'est élargi à d'autres horizons en devenant politique, sociologique ou ludique en défiant les codes jusqu'à devenir carrément provocateur. Mais justement, si l'art suscite des réactions parfois débordantes, c'est quelque part pour nous interpeller sur la bêtise humaine ou pour nous faire prendre conscience du besoin inné de l'homme d'aller de l'avant.
S'intéresser à l'art est une chose. Collectionner en est une autre. On peut aimer l'art sans acheter ou en s'offrant des copies pour le plaisir de l'oeil tandis que le profil des collectionneurs a considérablement changé puisque les véritables passionnés ont laissé la place à une race de riches qui spéculent à tout va sur des oeuvres contemporaines pour glorifier leur réussite mais l'art n'a pas besoin de ce monde parallèle pour exister. Il suffit de sortir de chez soi, d'entrer dans un musée ou une galerie, de se promener dans les rues pour voir que les hommes peuvent donner le meilleur d'eux-même et vérifier combien il est important dans nos vies.
Cela posé, comme cela a été démontré il y ap lus de 30 000 ans, tout individu a en lui un talent artistique qui ne demande qu'à s'exprimer à condition de le vouloir et de s'entraîner. Tout enfant manifeste son envie de dessiner mais ce désir s'estompe après les années de CP parce que l'art, pas plus que son histoire, n'est pas une matière obligatoire au lycée. Pourtant, il existe un ministère de la Culture fait pour le promouvoir mais tant qu'un niveau acceptable de savoir ne sera pas au rendez-vous, ce sera peine perdue pour rendre les jeunes plus perceptifs à ce domaine.
Adrian Darmon
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