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La crise financière et boursière qui a dévasté la planète à partir de la mi-septembre de l'année 2008 n'a pas épargné le marché de l'art malgré le succès de la vente de la collection Pierre Bergé - Yves Saint Laurent par Christie's à la fin du mois de février.

Comme on pouvait s'y attendre, le résultat encourageant de cette vente hors normes n'a été qu'un écran de fumée masquant une réalité évidente, à savoir les pertes financières subies depuis six mois par de nombreux riches amateurs qui achetaient sans compter pour asseoir leur statut social. Des centaines de millionnaires américains, russes, chinois, indiens ou européens ont ainsi vu leur fortune fondre comme neige au soleil sous les effets pernicieux de la crise laquelle a partout engendré une baisse de moral parmi les individus.

Ses performances étant étroitement liées à la prospérité économique de la planète, le marché de l'art n'a donc pas été épargné par l'onde de choc de la crise qui a eu au moins le mérite de faire cesser une spéculation effrénée dans plusieurs domaines, dont celui de l'art contemporain, mais aussi le désavantage de provoquer un net recul de l'activité des professionnels.

Au fil des semaines, le marché de l'art s'est retrouvé à faire du sur-place avec la crainte qu'il ne soit confronté à une situation comparable à celle qui s'instaura après la crise de Wall Street en 1929 lorsque pratiquement plus aucune oeuvre ne parvenait à être vendue.

Il y aura certainement une sortie de crise mais celle-ci n'aura lieu au mieux qu'à partir de la fin de 2010, ce qui signifie que les maisons de vente, antiquaires, brocanteurs et galeristes auront à supporter deux années de disette durant lesquelles nombre de faillites seront à déplorer.

Pour l'instant, il n'y a que les pièces exceptionnelles qui ont pu se vendre pour la simple raison qu'elles représentent des valeurs sûres alors que les oeuvres d'artistes contemporains propulsés vers les sommets depuis ces deux décennies ont enregistré une baisse d'environ 20%M en un an, que ce soit celles d'Andy Warhol, Jeff Koons, Maurizio Cattelan, Damien Hirst et autres qui intéressaient les acteurs du monde de la finance ou les riches entrepreneurs lesquels ont pratiquement disparu du marché.

L'autre fait inquiétant concerne l'agonie du marché aux Puces de Saint-Ouen devenu désert bien avant le début de la crise alors qu'auparavant,il servait de baromètre au marché. La situation n'a pas été plus reluisante du côté des galeries dont l'activité s'est considérablement ralentie alors que les ventes organisées à l'Hôtel Drouot, un moment boostées par les achats de particuliers qui ont tourné le dos aux placements boursiers, ont fini par subir un net ralentissement depuis le début de l'année 2009.

La crise s'amplifiant avec une augmentation massive du chômage et une baisse de l'activité économique dans le monde, il va sans dire que le marché de l'art a été en recul mais qu'il reste néanmoins plus performant que les places boursières et financières en termes de rendement. Il reste que la situation des professionnels n'a pas laissé d'inquiéter car leurs frais ont continué à courir pour grever rapidement leurs réserves. Or, la crise n'a pas encore atteint son point culminant, ce qui pourrait affecter encore plus le marché de l'art et le mettre à mal comme après la crise de 1929.

Le seul point positif qu'on puisse retenir dans cette analyse est que le marché s'est structuré depuis ces 25 dernières années, ce qui n'était pas le cas durant les décennies précédentes lorsqu'il dépendait d'un groupe plus restreint de collectionneurs. Depuis, et avec l'appaition d'une multitude de guides sur l'art, les choses ont diablement changé pour faire du marché de l'art est une entité respectable régulée constamment par des ventes clairement analysées et surveillées à la loupe de sorte que ses acteurs ont pu un peu mieux prendre sa température. L'ennui a été que rares ont été les analystes à pouvoir prédire l'ampleur de la crise financière et boursière et ses effets sur le marché de l'art alors que les prix démentiels constatés dans le domaine de l'art contemporain entre 2004 et le début de 2008 auraient dû les inciter à prévenir les amateurs à faire montre de prudence bien avant le déferlement de la crise.

Désormais, les remises en question ont été à l'ordre du jour, notamment dans le domaine de l'art contemporain, tandis que le le marché est revenu à son niveau de 2005 avec le risque de retomber plus bas d'autant plus que le succès de la vente de la collection Bergé-Saint-Laurent comptera au final pour de beurre puisque la crise est loin d'être terminée.

Adrian Darmon