Les Amstellodamois ne jurèrent que par Rembrandt Van Rijn jusqu'au jour où il finit par leur déplaire. A partir du moment où il perdit toute sa fortune, ceux-ci durent vraisemblablement l'appeler Rembrandt Van Ruine…
Le musée du
Jeu de Paume à Paris rend hommage à l'œuvre filmée d'Ana Mendieta, artiste
américano-cubaine disparue tragiquement à New-York en septembre 1985 dont les audaces et
son engagement pour une liberté totale d'expression ont profondément influencé
les mouvements artistiques et féministes actuels.
Cette
exposition intitulée "Ana Mendieta, Le temps et l'histoire me
recouvrent" d'après le titre d'une interview de l'artiste qui avait
rappelé l'impact subi par ses voyages au Mexique, notamment lorsqu'en 1973 elle
s'était représentée recouverte de fleurs et d'herbes dans une tombe aztèque pour
engager un dialogue entre le paysage et le corps féminin, permet de découvrir l'univers
dérangeant de cette artiste qui interpellait la nature en utilisant son corps
pour créer son art après qu'elle eût été arrachée à sa patrie durant son
adolescence.
Ania Mendieta utilisait également le
sang, le feu, la terre et l'eau pour créer des tableaux "viscéraux et des sculptures
éphémères " pour explorer la vie, la mort et la renaissance en étant
inspirée par sa religion natale, la Santeria qui mêlait des emprunts catholiques aux rites afro-cubains comme dans son film « Chicken Piece »
de 1972 dans lequel elle se montra nue, debout devant le mur blanc d'une
galerie et face au public en tenant fermement une poule décapitée agitée de
soubresauts qui éclaboussait son corps
avec des gerbes de sang.
Tout respirait
la tragédie dans son œuvre et dans son existence à travers une liberté totale
de créativité comme lorsqu'elle osa se montrer dans « Rape »
(1973) avec le corps ensanglanté ou dans « Sweating
Blood » avec le visage perlé de gouttes de sang tombant de son front,
image prémonitoire puisqu'elle mourut à 36 ans le 8 septembre 1985 en tombant d'une
fenêtre située au 34 e étage d'un immeuble de New York.
Née dans une
famille bourgeoise à La Havane en 1948, l'artiste avait passé la plus grande
partie de sa vie en exil, loin de sa famille et de sa patrie. En 1961, à l'âge
de 13 ans, ses parents avaient décidé de
l'envoyer vivre aux Etats-Unis dans des
familles d'accueil de l'Iowa avec sa soeur Raquel, de deux ans son aînée, en
bénéficiant de l'aide du Catholic Welfare Bureau mais en étant séparée de cette
dernière.
Elle ne revit plus le reste de sa famille durant plusieurs
années alors que son père avait été emprisonné jusqu'en 1979 par le régime castriste pour des activités
antirévolutionnaires avant de mourir quatre ans plus tard. Elève douée, Ania
obtint une maîtrise en peinture en 1972 et une autre en arts visuels après
avoir découvert le Mexique en faisant notamment la connaissance d'Allan Kaprow,
Vito Accounci ou Robert Wilson avant de choisir de faire des performances et de
s'installer en 1978 à New York et de recevoir en 1980 une bourse Guggenheim.
Bénéficiant de plusieurs expositions, elle fut considérée comme une des femmes
artistes émergentes aux Etats-Unis en voyant alors sa cote progresser sur le marché.
En janvier
1985, Ania Mendieta épousa l'artiste américain Carl Andre, 49 ans, l'un des
fondateurs de l'école de sculpture minimaliste qui créait des œuvres avec des
plaques d'acier, du bois, des briques et divers matériaux. Ancien militaire, ce
dernier aimait faire la fête et boire plus que de raison, ce qui entraîna des frictions avec son épouse. Justement, le 8 septembre 1985, alors qu'elle
venait d'inaugurer une exposition rétrospective de ses œuvres, Ania eut une dispute
violente avec lui avant d'être retrouvée morte au pied de son immeuble à
Greenwich Village.
Selon le
procureur du district de Manhattan, il y avait eu lutte dans l'appartement du
couple d'autant plus que Carl Andre présentait des éraflures sur le nez et ses
avants bras. Arrêté et accusé d'avoir défenestré sa femme, il fut toutefois libéré
en échange d'une caution de 250.000 dollars dans l'attente de son jugement.
En voyant qu'elle
avait disparu de leur appartement après cette dispute, l'artiste avait appelé
la police pour signaler sa disparition en indiquant qu'elle s'était querellée
avec lui parce qu'il était soi-disant plus exposé qu'elle. De fait, Ania avait beaucoup bu
ce soir là et pour l'accusation, Carl, énervé par son attitude violente, l'avait
fait tomber par la fenêtre. Se sentant acculé dans les cordes, celui-ci avait modifié sa
version devant le tribunal en affirmant qu'il regardait la télévision avec elle
avant qu'elle ne parte se coucher mais que quand il avait regagné la chambre,
elle n'était plus là.
Cette
déclaration fut toutefois mise en doute par un portier qui travaillait à côté
de l'immeuble qui affirma qu'avant que le corps de la jeune femme ne s'écrase
au sol, il avait entendu des cris ponctués de « Non, non, non ! »
alors qu'il fut révélé devant la cour que la victime avait une peur panique du vide.
Jugé innocent, faute de preuves à son encontre, Car Andre ne montra aucun signe d'émotion
en entendant le verdict tandis que la
mère et la sœur d'Ania Mendieta, hurlèrent qu'il était un meurtrier en
signalant que, lassée par ses multiples infidélités, elle l'avait fait suivre
par un détective mais ce témoignage avait été jugé irrecevable par le tribunal.
Carl Andre
avait eu de la chance tant sa culpabilité paraissait évidente, probablement du fait qu'il était blanc et qu'il
bénéficiait alors de l'appui des cercles élitistes du monde de l'art, ses amis
ayant estimé qu'il était victime d'une cabale féministe, et certainement parce
que la police avait bâclé son enquête sur la mort de sa femme.
Ania aura
obtenu une revanche posthume à travers de nombreuses expositions qui lui ont
rendu hommage, comme celle organisée à
Paris jusqu'au 27 janvier 2019, tandis la rétrospective organisée en 2014 par
la Dia Foundation sur les sculptures de Carl André fut chahutée
copieusement par des féministes, tout comme celle qui eut ensuite lieu à Berlin
où des manifestantes circulèrent les mains recouvertes de peinture rouge, pour rappeler les représentations d'Ania lorsqu'elle avait étalé ses bras couverts de
sang sur des toiles ou des feuilles de papier dans le cadre d'une performance
intitulée Body Tracks (1974-1982)
Le musée du
Jeu de Paume à Paris rend hommage à l'œuvre filmée d'Ana Mendieta, artiste
américano-cubaine disparue tragiquement à New-York en septembre 1985 dont les audaces et
son engagement pour une liberté totale d'expression ont profondément influencé
les mouvements artistiques et féministes actuels.
Cette
exposition intitulée "Ana Mendieta, Le temps et l'histoire me
recouvrent" d'après le titre d'une interview de l'artiste qui avait
rappelé l'impact subi par ses voyages au Mexique, notamment lorsqu'en 1973 elle
s'était représentée recouverte de fleurs et d'herbes dans une tombe aztèque pour
engager un dialogue entre le paysage et le corps féminin, permet de découvrir l'univers
dérangeant de cette artiste qui interpellait la nature en utilisant son corps
pour créer son art après qu'elle eût été arrachée à sa patrie durant son
adolescence.
Ania Mendieta utilisait également le
sang, le feu, la terre et l'eau pour créer des tableaux "viscéraux et des sculptures
éphémères " pour explorer la vie, la mort et la renaissance en étant
inspirée par sa religion natale, la Santeria qui mêlait des emprunts catholiques aux rites afro-cubains comme dans son film « Chicken Piece »
de 1972 dans lequel elle se montra nue, debout devant le mur blanc d'une
galerie et face au public en tenant fermement une poule décapitée agitée de
soubresauts qui éclaboussait son corps
avec des gerbes de sang.
Tout respirait
la tragédie dans son œuvre et dans son existence à travers une liberté totale
de créativité comme lorsqu'elle osa se montrer dans « Rape »
(1973) avec le corps ensanglanté ou dans « Sweating
Blood » avec le visage perlé de gouttes de sang tombant de son front,
image prémonitoire puisqu'elle mourut à 36 ans le 8 septembre 1985 en tombant d'une
fenêtre située au 34 e étage d'un immeuble de New York.
Née dans une
famille bourgeoise à La Havane en 1948, l'artiste avait passé la plus grande
partie de sa vie en exil, loin de sa famille et de sa patrie. En 1961, à l'âge
de 13 ans, ses parents avaient décidé de
l'envoyer vivre aux Etats-Unis dans des
familles d'accueil de l'Iowa avec sa soeur Raquel, de deux ans son aînée, en
bénéficiant de l'aide du Catholic Welfare Bureau mais en étant séparée de cette
dernière.
Elle ne revit plus le reste de sa famille durant plusieurs
années alors que son père avait été emprisonné jusqu'en 1979 par le régime castriste pour des activités
antirévolutionnaires avant de mourir quatre ans plus tard. Elève douée, Ania
obtint une maîtrise en peinture en 1972 et une autre en arts visuels après
avoir découvert le Mexique en faisant notamment la connaissance d'Allan Kaprow,
Vito Accounci ou Robert Wilson avant de choisir de faire des performances et de
s'installer en 1978 à New York et de recevoir en 1980 une bourse Guggenheim.
Bénéficiant de plusieurs expositions, elle fut considérée comme une des femmes
artistes émergentes aux Etats-Unis en voyant alors sa cote progresser sur le marché.
En janvier
1985, Ania Mendieta épousa l'artiste américain Carl Andre, 49 ans, l'un des
fondateurs de l'école de sculpture minimaliste qui créait des œuvres avec des
plaques d'acier, du bois, des briques et divers matériaux. Ancien militaire, ce
dernier aimait faire la fête et boire plus que de raison, ce qui entraîna des frictions avec son épouse. Justement, le 8 septembre 1985, alors qu'elle
venait d'inaugurer une exposition rétrospective de ses œuvres, Ania eut une dispute
violente avec lui avant d'être retrouvée morte au pied de son immeuble à
Greenwich Village.
Selon le
procureur du district de Manhattan, il y avait eu lutte dans l'appartement du
couple d'autant plus que Carl Andre présentait des éraflures sur le nez et ses
avants bras. Arrêté et accusé d'avoir défenestré sa femme, il fut toutefois libéré
en échange d'une caution de 250.000 dollars dans l'attente de son jugement.
En voyant qu'elle
avait disparu de leur appartement après cette dispute, l'artiste avait appelé
la police pour signaler sa disparition en indiquant qu'elle s'était querellée
avec lui parce qu'il était soi-disant plus exposé qu'elle. De fait, Ania avait beaucoup bu
ce soir là et pour l'accusation, Carl, énervé par son attitude violente, l'avait
fait tomber par la fenêtre. Se sentant acculé dans les cordes, celui-ci avait modifié sa
version devant le tribunal en affirmant qu'il regardait la télévision avec elle
avant qu'elle ne parte se coucher mais que quand il avait regagné la chambre,
elle n'était plus là.
Cette
déclaration fut toutefois mise en doute par un portier qui travaillait à côté
de l'immeuble qui affirma qu'avant que le corps de la jeune femme ne s'écrase
au sol, il avait entendu des cris ponctués de « Non, non, non ! »
alors qu'il fut révélé devant la cour que la victime avait une peur panique du vide.
Jugé innocent, faute de preuves à son encontre, Car Andre ne montra aucun signe d'émotion
en entendant le verdict tandis que la
mère et la sœur d'Ania Mendieta, hurlèrent qu'il était un meurtrier en
signalant que, lassée par ses multiples infidélités, elle l'avait fait suivre
par un détective mais ce témoignage avait été jugé irrecevable par le tribunal.
Carl Andre
avait eu de la chance tant sa culpabilité paraissait évidente, probablement du fait qu'il était blanc et qu'il
bénéficiait alors de l'appui des cercles élitistes du monde de l'art, ses amis
ayant estimé qu'il était victime d'une cabale féministe, et certainement parce
que la police avait bâclé son enquête sur la mort de sa femme.
Ania aura
obtenu une revanche posthume à travers de nombreuses expositions qui lui ont
rendu hommage, comme celle organisée à
Paris jusqu'au 27 janvier 2019, tandis la rétrospective organisée en 2014 par
la Dia Foundation sur les sculptures de Carl André fut chahutée
copieusement par des féministes, tout comme celle qui eut ensuite lieu à Berlin
où des manifestantes circulèrent les mains recouvertes de peinture rouge, pour rappeler les représentations d'Ania lorsqu'elle avait étalé ses bras couverts de
sang sur des toiles ou des feuilles de papier dans le cadre d'une performance
intitulée Body Tracks (1974-1982)