Attendu le 29 mars
2019, le Brexit provoquera à coup sûr des changements pour le marché de l'art européen quel
que sera son aspect alors que règne une grande incertitude sur plusieurs
sujets, comme les frais, les retards d'envoi aux frontières, les problèmes de
TVA ou des problèmes de paperasserie.
Selon les règlements de l'organisation
mondiale du commerce, les importations dans l'UE d'œuvres d'art provenant du Royaume-Uni ne devraient
pas être taxées après le Brexit puisque celles des Etats-Unis ne le sont pas.
Certes, des Etats membres de l'UE
pourraient ignorer ces règlements s'ils venaient à vouloir négocier avec
Londres mais cela impliquerait des compensations commerciales au cas où ils
voudraient punir le Royaume-Uni. Une alternative peu souhaitable.
Londres abrite de nombreux
agents ou marchands d'art qui ont
profité des avantages bénéficiant à la capitale britannique, comme un taux
réduit de TVA de 5% sur leurs transactions avec des clients européens qui est le plus faible de l'UE.
Par exemple, si un
collectionneur espagnol veut acheter une œuvre pour 100,000 dollars à New York,
le taux de TVA dans son pays est de 21%, soit 21,000 dollars, somme à laquelle
il faudra ajouter d'autres taxes et frais de l'ordre de 9,000 dollars, ce qui
gonflera sa facture à 130,000 dollars, soit 30% du montant initial. Pour éviter
de tels frais, ce collectionneur fait appel à un agent ou marchand londonien
pour acquérir l'œuvre en question pour son compte. Donc, l'intermédiaire se charge d'envoyer l'œuvre à Londres, et de ce fait dans l'UE, pour une taxe d'importation
de 5% alors que les autres taxes afférentes restent minimes par rapport à
celles appliquées en Espagne. Au bout du compte, sa facture s'alourdira de
seulement 1000 ou 2000 dollars, ce qui fera que l'œuvre ne lui coûtera que
108,000 dollars. Ainsi, si l'agent ou le marchand ne lui prend qu'une commission
de 10,000 dollars, il fera un gain de 12,000 dollars par rapport au prix qu'il
aurait eu à payer en achetant lui-même l'œuvre pour se la faire livrer
directement chez lui.
Néanmoins, cet avantage s'est
réduit depuis ces derniers 18 mois après la décision de la France et de l'Espagne
de baisser leur taux de TVA pour rendre celle-ci plus compétitive. Après le
Brexit, les agents ou marchands basés à Londres pourraient ainsi se délocaliser
à Bruxelles ou Paris, où le taux de TVA
est respectivement de 6% et 5%.
D'un autre côté, les licences d'exportation
dans l'UE pourraient être un handicap lors d'un envoi vers un pays non membre
puisque, par exemple, le taux appliqué par l'Espagne est de 33%. En attendant, des firmes ont
pris les devants avant l'arrivée du Brexit en imaginant des solutions depuis deux
ans, notamment à propos de ce qui se passera dans les ports en termes de
retards et de sécurité. Pour ce faire, elles ont pensé à effectuer les
formalités douanières dans leurs propres entrepôts, ce qui signifie qu'elles
ont obtenu l'autorisation des douanes pour faire entrer au plus vite les
marchandises au lieu qu'elles soient bloquées dans les ports et aéroports.
Néanmoins, les marchands et les collectionneur important des oeuvres ignorent
encore quels seront les frais appliqués sur les documents de transit ainsi que les garanties sur chaque envoi en cas de Brexit dur.
En cas de non-accord sur le
Brexit, la question se posera sur les obligations concernant les personnes
exportant ou important des œuvres au sein de l'UE ou celles faisant des ventes
dans l'union. Les importations au Royaume Uni d'œuvres provenant de l'UE seront
ainsi traitées de la même manière que pour celles provenant d'autres pays
assorties de déclarations d'importation, de vérifications et taxes douanières.
Toutefois, au lieu d'avoir à payer immédiatement une TVA d'importation, les
marchands britanniques pourront toujours la différer, que ce soit en provenance de l'UE
ou non, puisqu'ils n'auront à remplir leur déclaration qu'au bout d'un délai de
trois mois, comme c'est l'usage actuellement.
Par ailleurs, il n'y aura pas
de TVA appliquée sur les exportations d'œuvres du Royaume-Uni vers les pays de
l'UE mais celles-ci pourraient faire l'objet d'une TVA d'importation. De plus,
les marchands britanniques n'auront plus
à remplir des listes de ventes détaillées à des sociétés soumises à la TVA dans
l'union mais elles devront apporter la preuve que les œuvres ont bien quitté le
Royaume-Uni.
Devant prendre en compte la TVA
d'importation de l'UE, les galeries britanniques effectuant des ventes dans l'union
devront se conformer aux règlements en vigueur tandis que celles entretenant des relations d'affaires avec des fournisseurs ou clients européens devront obtenir un numéro d'identification
auprès de l'opérateur économique des enregistrements pour les affaires
douanières en devant s'assurer que les contrats soient en conformité avec les
conditions édictées par l'UE. Au bout du compte, le Royaume-Uni devra respecter
les textes de l'UE concernant le règlement de la TVA dans chaque pays membre.
Nombre de galeristes ont
affiché leur perplexité face à la complexité du problème posé, notamment les
Européens qui ont des entités au Royaume-Uni, lesquels ne savent pas vraiment à quel
saint se vouer au point d'envisager des mesures d'urgence car si la logistique
et les frais devenaient onéreux, ils n'auraient plus qu'à quitter le pays. Pour
l'instant, c'est « wait and see » sauf qu'un non-accord sur le Brexit
créerait des incertitudes sur les questions des importations et exportations
qui ne seraient pas favorables à la conduite de leurs affaires.