Question : L'art contemporain est-il donc comparable à un effet de mode ? Réponse : En grande partie oui or, si on se réfère à la haute couture, qui fait partie dela mode. De nombreux couturiers en vogue il y a 20 ans ont mis depuis la clé sous la porte pour diverses raisons qui tiennent à la crise économique ou à la concurrence des pays asiatiques où sévissent des rois de la copie à bon marché ainsi qu'aux changements de goûts. Le parallèle vaut pour l'art contemporain, un domaine où on a vu émerger des dizaines d'artistes chinois qui ont d'abord séduit les collectionneurs asiatiques avant de figurer de plus en plus dans les foires européennes. D'autre part, il ne faut pas négliger les plagiats qui se vendent maintenant comme des petits pains puisque bon marché un peu partout dans le monde, un phénomène dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences mais qui risque à un moment ou à un autre de porter ombrage au marché des valeurs dites sûres. Le jour n'est pas loin où certains artistes recherchés seront copiés sans vergogne dans des pays où les touristes trouveront amusant de s'offrir à vil prix des créations bluffantes. Néanmoins, cela ne perturbe pas encore vraiment les amateurs qui ont leurs regards obstinément tournés vers les grandes manifestations et les ventes aux enchères sans trop chercher à analyser leurs choix.
Question : Les artistes contemporains en pointe ont-ils tous du talent ? Réponse : Certains oui, d'autres non si on considère que leur célébrité dépend en grande partie des campagnes de promotion qui s'opèrent sur leurs noms. En fait, dans ce domaine, les artistes sont loin d'être égaux comme cela est le cas pour la peinture ancienne, l'Impressionnisme, le Cubisme et d'autres mouvements. Il y a de plus une injustice criante dans le domaine de l'art contemporain car il existe de nombreux artistes dotés d'un réel talent qui n'ont pas eu la chance d'être promus commercialement. On se demande d'ailleurs parfois si certains galeristes ne sont pas tombés sur la tête en exposant à la FIAC ou d'autres grandes foires des artistes dont les créations sont propres à laisser songeur.
Question : Existe-t-il une intelligentsia du marché de l'art et si oui, exerce-t-elle une domination sur le marché ? Réponse : Oui à l'évidence car le monde de l'art contemporain dépend avant tout des marketing men de Christie's ou Sotheby's, de galeristes en vogue et de magazines qui consacrent surtout leurs pages à des artistes qui ont actuellement la cote. Le rôle de ces acteurs est pernicieux à certains égards puisqu'ils ont contribué à créer une élite difficile, sinon impossible, à contourner.
Question : Les grands collectionneurs jouent-ils un rôle important dans l'explosion de certaines cotes d'artistes ? Réponse : Sans aucun doute. Il suffit que François Pinault, un des plus grands collectionneurs de la planète, s'intéresse subitement à tel ou tel artiste pour que la cote de ce dernier enfle exagérément. Certains journalistes, et non des moindres, ont été d'ailleurs jusqu'à affirmer que personne ne pouvait rivaliser avec le propriétaire de Christie's lorsqu'il s'agissait de détecter les stars de demain. Bref, ce qu'il achète est donc censé devenir de l'or en barre. C'est là où on se rend compte que les grands collectionneurs ont mis les critiques d'art sous l'éteignoir s'agissant de la promotion des artistes contemporains alors qu'il y a un demi-siècle leurs prédécesseurs avaient tendance à acheter des valeurs déjà consacrées comme le Dr Barnes ou d'autres amateurs aisés.
Question : L'argent a-t-il eu un effet pernicieux sur le marché de l'art ? Réponse ; Oui évidemment puisque ceux qui font monter et exploser les cotes ont d'énormes moyens financiers à leur disposition et que leur mode de vie est tourné vers la modernité associée au luxe. Là, les connaissances s'effacent devant la force financière qui relègue donc loin les critères classiques adoptés pour les achats effectués dans d'autres domaines. La cote d'un Kandinsky, d'un Picasso, d'un Monet ou d'un Renoir reste plus ou moins bien établie. Là, les acheteurs savent dans quelle fourchette acheter alors que pour l'art contemporain, les fluctuations, souvent à la hausse, sont brutales et difficilement explicables. On saura toutefois gré à François Pinault, Bernard Arnault et d'autres capitaines d'industrie d'avoir donné un formidable élan à l'art contemporain à travers leurs innombrables achats qui leur ont permis notamment de créer des centres d'art appelés à rendre durable la célébrité des auteurs des œuvres qu'ils abritent mais leurs actions dérivent surtout d'un marketing reposant plus sur leurs capacités financières que sur un goût pertinent quand bien même leurs choix auraient tout pour s'avérer être payants.
Question : Jusqu'à quelles limites l'art contemporain peut-il aller ? Réponse : Nul ne sait surtout que les artistes ont plutôt le chic de sans cesse explorer les territoires de la dérision et de la provocation. Du moment qu'ils bénéficient d'une promotion à grande échelle et de l'appui d'acheteurs qui sont pour eux de véritables mécènes, il n'y a pratiquement aucune frontière propre à être déterminée avec certitude d'autant plus que les mouvements actuels, si tant est qu'on puisse évoquer une réelle existence de ceux-ci, continuent à essaimer en transformant le domaine de l'art contemporain en tour de Babel où se côtoient l'art brut, le nouveau réalisme, le stuckisme, le land art, le pop art revisité, le body-art, l'art trash, le conceptuel, la vidéo, l'abstraction ou même le virtuel. Subitement, les créations de Walt Disney deviennent ainsi de l'art au sens propre. Il a suffi de reprendre le concept de Duchamp avec son fameux urinoir présenté à l'Armory Show de New York en 1913 pour décréter que tout était de l'art. A partir de là, les formulations ont été quasiment infinies puisqu'on trouve de tout dans les foires d'art contemporain où le propos est d'étonner sans cesse et de transformer l'étonnement en vérité qu'il suffit d'affirmer. On a déjà vu des artistes aller jusqu'à se mutiler sur une toile pour l'imprégner de leur sang jusqu'à en mourir. On en a vu d'autres mettre de la merde en boîte dès les années 1960, d'autres encore se servir de leur excréments ou de leur sperme pour peindre ou montrer en vidéo des transformations physiques réalisées à vif ou sous anesthésie avec l'aide de chirurgiens et on risque de voir d'autres événements artistiques encore plus « gore » sans oublier d'autres mises en scène où le scabreux peut virer au blasphème jusqu'à provoquer des indignations dont les conséquences, encore limitées aujourd'hui, finiront demain par être plus graves. Les provocations sont ainsi de plus en plus poussées à l'extrême alors que l'art actuel se nourrit plus qu'hier de constats politiques, sociaux et religieux, le propos étant souvent d'interpeller le spectateur au plus profond de lui-même quitte à lui donner le haut le cœur. On ne niera donc pas que l'art contemporain joue un rôle sociologique aux effets de yo-yo, allant de la pertinence à l'outrance en passant par le bizarre, le choc émotionnel, la remise en question de ses propres certitudes, le questionnement sur le devenir de l'homme ou de la planète, les croyances, les fantasmes ou l'illusion. Il y a là un concept étendu de liberté que les artistes contemporains ne se privent pas d'utiliser en faisant abstraction de la faculté qu'avait leurs aînés de s'autocensurer.
Le marché de l'art contemporain est de loin le secteur le plus actif et le plus porteur de ces dernières années mais d'un autre côté, son côté hautement spéculatif fait qu'il peut s'avérer hautement risqué.
Il est comme un puits sans fond dont l'eau peut devenir imbuvable pour peu que les prix payés pour ses artistes actuellement en pointe se mettent à gonfler d'une manière irrationnelle.
Question : est-il donc dans l'irrationnel ? Réponse : Oui à maints égards au vu de cotes démentielles atteintes pour des artistes dont les œuvres se vendent bien plus cher que celles de certains Impressionnistes et autres grands maîtres de la peinture classique, au vu également des créations proposées où l'art se trouve relégué au profit de la provocation ou du sensationnel.
Question : Pourquoi est-il si performant ? Réponse : Parce qu'il fait l'objet d'un marketing agressif et outrancier que ce soit à travers les grandes maisons de vente, les galeries en pointe ou les foires comme ArtBasel, Frieze ou la FIAC pour ne citer que celles-ci sans oublier les magazines qui consacrent l'essentiel de leurs pages aux artistes en vogue. Parce que les acheteurs, en général fortunés, suivent aveuglément cette tendance qui consiste à faire des artistes des valeurs comparables aux actions boursières. « Untel monte, j'achète », ce qui veut dire que le talent d'un artiste importe peu dans la démarche d'un acheteur qui agit selon un critère de mode pour se faire valoir, comme on acquiert une voiture de luxe pour épater les amis. « La cote d'untel a triplé, je vends », ce qui veut dire que les acheteurs ont pour la plupart tendance à spéculer. Autre facteur, l'augmentation du nombre des millionnaires aux Etats-Unis et en Europe. Souvent assez jeunes, leurs goûts se portent naturellement vers ce qui est outrageusment moderne d'où le succès d'œuvres contemporaines qui s'insèrent bien mieux dans leur cadre de vie que l'art ancien.
Question : Si l'art contemporain semble inépuisable y-a-t-il un risque de dérapage ? Réponse : Forcément puisque l'activité du marché s'est accélérée et que les collectionneurs n'ont pas beaucoup de temps devant eux pour mesurer un artiste à sa juste valeur. Ainsi, les prix pour les tableaux anciens ou modernes ont suivi une courbe ascensionnelle plutôt constante durant ces 50 dernières années, au contraire de ceux enregistrés pour les artistes contemporains lesquels n'ont pas cessé d'exploser. A ce sujet, on a vu des cotes multipliées par dix en moins d'une décennie pour certains artistes, notamment Jeff Koons ou Maurizio Cattelan sans pouvoir avoir la certitude de savoir si cela était justifié ou non.
Question : Existe-t-il un moyen de réguler un peu mieux ce marché ? Réponse : Oui si les acheteurs deviennent avisés et s'ils se donnent les moyens de développer leurs connaissances, ce qui n'est pas vraiment le cas aujourd'hui. Résultat : ils choisissent les artistes qui se vendent le mieux dans les salles de vente ou les galeries.
Question : Que couvre le domaine de l'art contemporain ? Réponse : En général, il concerne des artistes vivants bien que sous ce label des maisons de vente comme Sotheby's ou Christie's proposent des œuvres d'artistes disparus depuis plus de vingt ans et dont les prix suivent une courbe plus rationnelle. En fait l'art contemporain concerne avant tout les artistes vivants faisant partie d'un vivier sans cesse en développement et dont les valeurs sont plus difficiles à déterminer puisqu'elles dépendent surtout de campagnes de marketing souvent répétes mais qui peuvent s'arrêter brutalement pour certains qui seront dès lors moins recherchés.
L'artiste contemporain est donc un créateur qui se vend comme un produit qui peut un jour ou l'autre ne plus avoir les faveurs des amateurs? Réponse: Comme pour l'activité d'une entreprise, il faut constamment veiller à ce que la flamme reste allumée au risque de voir les ventes baisser alors que dans les domaines de la peinture ancienne ou de la peinture moderne les prix montent naturellement lorsque l'offre se réduit, ce qui n'est pas le cas pour l'art contemporain où l'offre est constamment renouvelée puisqu'il suffit de trouver de nouveaux artistes bien dans l'air du temps pour les lancer et assurer leur promotion.
Question : Les artistes contemporains recherchés aujourd'hui le seront-ils demain ? Réponse : Probablement pas tous si la situation économique internationale se détériore, ce qui conduira à un ralentissement du marché de l'art. Dans ce cas, les acheteurs préféreront jouer la prudence en misant sur des œuvres d'artistes considérés comme des valeurs sûres. Donc, il y aura à coup sûr des corrections inévitables qui se feront d'abord au niveau de l'art contemporain, jugé alors comme le plus instable. Pour l'instant, les fluctuations sont positives et même hors normes.
Question : Une œuvre de tel ou tel artiste contemporain achetée au prix d'un Canaletto est-ce raisonnable ? Réponse : Non, si on prend en compte un certain nombre de critères, qu'ils soient artistiques ou historiques sans oublier que la renommée de l'artiste en question a été bâtie soudainement et que sa valeur repose grandement sur un effet de mode. Avec l'art contemporain, on entre dans une autre dimension où l'accélération des prix est brutale. On se trouve non plus dans un périmètre défini mais plutôt dans la stratosphère du marché de l'art.
Question : L'art contemporain peut-il avoir un impact révolutionnaire comme l'Impressionnisme, le Cubisme, le Surréalisme ou l'Abstraction ? Réponse : Parfois oui lorsqu'il permet d'aborder de nouvelles techniques ou de définir de nouvelles tendances. Souvent non lorsqu'il se projette dans la provocation à outrance et dans le n'importe quoi. Il y a des courants dans l'art contemporain comme le Stuckisme ou l'art néo-expressionniste développé par certains artistes allemands sans oublier les héritiers de Warhol, les concepteurs d'installations assez géniales ou certains avant-gardistes mais il n'y a pas de mouvement devenu suffisamment solide dans le temps d'autant que les artistes sont de plus en plus du genre à travailler chacun de leur côté. D'autre part, que deviendront donc les installations vidéo de Nam June Paik ou les œuvres en néon de Dan Flavin dans 30 ans ? Aura-t-on encore les moyens d'assurer leur maintenance ? Rien n'est moins sûr. En attendant, l'explosion du nombre d'artistes sur la scène internationale ne cesse de s'amplifier, ce qui ne facilite guère les choses lorsqu'il s'agit de déterminer ceux qui sont susceptibles de devenir indéboulonnables surtout que la mode est faite pour changer.
Question : L'art contemporain est-il donc comparable à un effet de mode ? Réponse : En grande partie oui or, si on se réfère à la haute couture, qui fait partie dela mode. De nombreux couturiers en vogue il y a 20 ans ont mis depuis la clé sous la porte pour diverses raisons qui tiennent à la crise économique ou à la concurrence des pays asiatiques où sévissent des rois de la copie à bon marché ainsi qu'aux changements de goûts. Le parallèle vaut pour l'art contemporain, un domaine où on a vu émerger des dizaines d'artistes chinois qui ont d'abord séduit les collectionneurs asiatiques avant de figurer de plus en plus dans les foires européennes. D'autre part, il ne faut pas négliger les plagiats qui se vendent maintenant comme des petits pains puisque bon marché un peu partout dans le monde, un phénomène dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences mais qui risque à un moment ou à un autre de porter ombrage au marché des valeurs dites sûres. Le jour n'est pas loin où certains artistes recherchés seront copiés sans vergogne dans des pays où les touristes trouveront amusant de s'offrir à vil prix des créations bluffantes. Néanmoins, cela ne perturbe pas encore vraiment les amateurs qui ont leurs regards obstinément tournés vers les grandes manifestations et les ventes aux enchères sans trop chercher à analyser leurs choix.
Question : Les artistes contemporains en pointe ont-ils tous du talent ? Réponse : Certains oui, d'autres non si on considère que leur célébrité dépend en grande partie des campagnes de promotion qui s'opèrent sur leurs noms. En fait, dans ce domaine, les artistes sont loin d'être égaux comme cela est le cas pour la peinture ancienne, l'Impressionnisme, le Cubisme et d'autres mouvements. Il y a de plus une injustice criante dans le domaine de l'art contemporain car il existe de nombreux artistes dotés d'un réel talent qui n'ont pas eu la chance d'être promus commercialement. On se demande d'ailleurs parfois si certains galeristes ne sont pas tombés sur la tête en exposant à la FIAC ou d'autres grandes foires des artistes dont les créations sont propres à laisser songeur.
Question : Existe-t-il une intelligentsia du marché de l'art et si oui, exerce-t-elle une domination sur le marché ? Réponse : Oui à l'évidence car le monde de l'art contemporain dépend avant tout des marketing men de Christie's ou Sotheby's, de galeristes en vogue et de magazines qui consacrent surtout leurs pages à des artistes qui ont actuellement la cote. Le rôle de ces acteurs est pernicieux à certains égards puisqu'ils ont contribué à créer une élite difficile, sinon impossible, à contourner.
Question : Les grands collectionneurs jouent-ils un rôle important dans l'explosion de certaines cotes d'artistes ? Réponse : Sans aucun doute. Il suffit que François Pinault, un des plus grands collectionneurs de la planète, s'intéresse subitement à tel ou tel artiste pour que la cote de ce dernier enfle exagérément. Certains journalistes, et non des moindres, ont été d'ailleurs jusqu'à affirmer que personne ne pouvait rivaliser avec le propriétaire de Christie's lorsqu'il s'agissait de détecter les stars de demain. Bref, ce qu'il achète est donc censé devenir de l'or en barre. C'est là où on se rend compte que les grands collectionneurs ont mis les critiques d'art sous l'éteignoir s'agissant de la promotion des artistes contemporains alors qu'il y a un demi-siècle leurs prédécesseurs avaient tendance à acheter des valeurs déjà consacrées comme le Dr Barnes ou d'autres amateurs aisés.
Question : L'argent a-t-il eu un effet pernicieux sur le marché de l'art ? Réponse ; Oui évidemment puisque ceux qui font monter et exploser les cotes ont d'énormes moyens financiers à leur disposition et que leur mode de vie est tourné vers la modernité associée au luxe. Là, les connaissances s'effacent devant la force financière qui relègue donc loin les critères classiques adoptés pour les achats effectués dans d'autres domaines. La cote d'un Kandinsky, d'un Picasso, d'un Monet ou d'un Renoir reste plus ou moins bien établie. Là, les acheteurs savent dans quelle fourchette acheter alors que pour l'art contemporain, les fluctuations, souvent à la hausse, sont brutales et difficilement explicables. On saura toutefois gré à François Pinault, Bernard Arnault et d'autres capitaines d'industrie d'avoir donné un formidable élan à l'art contemporain à travers leurs innombrables achats qui leur ont permis notamment de créer des centres d'art appelés à rendre durable la célébrité des auteurs des œuvres qu'ils abritent mais leurs actions dérivent surtout d'un marketing reposant plus sur leurs capacités financières que sur un goût pertinent quand bien même leurs choix auraient tout pour s'avérer être payants.
Question : Jusqu'à quelles limites l'art contemporain peut-il aller ? Réponse : Nul ne sait surtout que les artistes ont plutôt le chic de sans cesse explorer les territoires de la dérision et de la provocation. Du moment qu'ils bénéficient d'une promotion à grande échelle et de l'appui d'acheteurs qui sont pour eux de véritables mécènes, il n'y a pratiquement aucune frontière propre à être déterminée avec certitude d'autant plus que les mouvements actuels, si tant est qu'on puisse évoquer une réelle existence de ceux-ci, continuent à essaimer en transformant le domaine de l'art contemporain en tour de Babel où se côtoient l'art brut, le nouveau réalisme, le stuckisme, le land art, le pop art revisité, le body-art, l'art trash, le conceptuel, la vidéo, l'abstraction ou même le virtuel. Subitement, les créations de Walt Disney deviennent ainsi de l'art au sens propre. Il a suffi de reprendre le concept de Duchamp avec son fameux urinoir présenté à l'Armory Show de New York en 1913 pour décréter que tout était de l'art. A partir de là, les formulations ont été quasiment infinies puisqu'on trouve de tout dans les foires d'art contemporain où le propos est d'étonner sans cesse et de transformer l'étonnement en vérité qu'il suffit d'affirmer. On a déjà vu des artistes aller jusqu'à se mutiler sur une toile pour l'imprégner de leur sang jusqu'à en mourir. On en a vu d'autres mettre de la merde en boîte dès les années 1960, d'autres encore se servir de leur excréments ou de leur sperme pour peindre ou montrer en vidéo des transformations physiques réalisées à vif ou sous anesthésie avec l'aide de chirurgiens et on risque de voir d'autres événements artistiques encore plus « gore » sans oublier d'autres mises en scène où le scabreux peut virer au blasphème jusqu'à provoquer des indignations dont les conséquences, encore limitées aujourd'hui, finiront demain par être plus graves. Les provocations sont ainsi de plus en plus poussées à l'extrême alors que l'art actuel se nourrit plus qu'hier de constats politiques, sociaux et religieux, le propos étant souvent d'interpeller le spectateur au plus profond de lui-même quitte à lui donner le haut le cœur. On ne niera donc pas que l'art contemporain joue un rôle sociologique aux effets de yo-yo, allant de la pertinence à l'outrance en passant par le bizarre, le choc émotionnel, la remise en question de ses propres certitudes, le questionnement sur le devenir de l'homme ou de la planète, les croyances, les fantasmes ou l'illusion. Il y a là un concept étendu de liberté que les artistes contemporains ne se privent pas d'utiliser en faisant abstraction de la faculté qu'avait leurs aînés de s'autocensurer.
Alors, il n'est pas étonnant d'apprendre chaque année que les foires d'art contemporains ont remporté un vif succès grâce à des amateurs de plus en plus acquis à leur cause qui achètent des œuvres comme des paquets d'actions. Il suffisait d'aller à Londres pour visiter la Frieze Art Fair au début du mois d'octobre pour mesurer l'engouement suscité par un tel événement alors qu'en parallèle, les maisons de ventes organisaient des ventes très prometteuses.
Cette foire créée en 2003 a ainsi enregistré une augmentation de 35% de visites par rapport à 2005 en attirant 1 700 journalistes de 24 pays et en vendant deux fois plus de catalogues, ce qui prouve l'attrait provoqué par l'art contemporain dont le public est généralement jeune, ce qui quelque part fait sa force.
Question : L'engouement pour l'art contemporain paraît donc une bonne chose alors pourquoi toutes ces interrogations ? Réponse : L'art contemporain est devenu comme une locomotive du marché mais si on ne pose pas de signaux clairs sur sa voie, si les systèmes d'aiguillage ne sont pas définis, s'il n'y a pas de gares pour faire des poses salutaires et si la vitesse de son développement n'est pas régulée, il y aura tôt ou tard un risque de déraillement.
Il y a des moments où il est nécessaire de faire le point, de faire le tri, de séparer le bon grain de l'ivraie, d'établir des monographies permettant de mieux connaître les artistes, de réévaluer les cotes, de fidéliser les acheteurs, de les rassurer et de les rendre avertis. Pour l'instant, l'art contemporain roule à un train d'enfer au point que certains des artistes qui font actuellement la une des revues d'art risquent de tomber en marche. Il ne faut surtout pas oublier que le monde est soumis cycliquement à des crises économiques et même qu'il est en crise permanente s'agissant de la situation restée instable dans certaines régions. Ces facteurs risquent à n'importe quel moment d'avoir des effets profonds un peu partout (rappelons-nous le 11 septembre 2001) pour peu que des conflits majeurs voient le jour et déstabilisent la planète. Le marché de l'art contemporains n'est donc pas à l'abri de secousses internes ou externes.
Question : Les Fonds d'Art contemporains jouent-ils un rôle primordial pour les artistes ? Réponse : Oui et non. Oui lorsqu'il s'agit de les aider à se faire connaître et à leur permettre de vivre. Non s'ils s'habituent à devenir des rentiers sans compter qu'il est difficile de comprendre les motivations de leurs commissions d'achat et de savoir si leurs membres se contentent de faire appel à leur libre-arbitre. Il y a là un flou persistent qui perdure depuis la création des Salons dont les jurys favorisaient des artistes jusqu'à les mener à la gloire alors qu'aujourd'hui, ces derniers ne bénéficient plus des cotes qu'ils avaient de leur vivant. On peut être donc pratiquement certain que des artistes contemporains actuellement encensés seront moins prisés dans 20 ou 50 ans. Comme leur cheptel est beaucoup plus important que celui de leurs aînés et que la communication joue aujourd'hui un rôle phénoménal, il y aura forcément bien plus de corrections inévitables. Naguère, les cotes prenaient du temps à se bonifier. Maintenant, il suffit d'une manifestation ou d'une vente phare pour propulser un artiste sur le devant de la scène. Ainsi, on peut être porté de croire que des événements comme la Frieze, la FIAC ou ArtBasel sont comme des "star academies" de l'art qui servent à promouvoir des nouveaux venus, sauf que le talent n'est plus un critère fondamental comme par le passé et que d'autres facteurs, plus difficiles à appréhender, entrent dorénavant en jeu pour mener à la réussite d'un artiste.