Le Musée Maillol présente jusqu'au 14 février une exposition consacrée au peintre allemand Christian Schad (1894-1982) qui fut l'un des plus importants peintres expressionnistes de son pays. Schad produisit une œuvre forte teintée d'un fort érotisme confinant au voyeurisme durant sa carrière et ce, avec une précision digne d'un chirurgien du pinceau. Il peignit avec un souci de réalisme des demi-mondaines, des travestis, des prostituées en décrivant un univers décadent qui allait disparaître avec l'avènement du nazisme.
Peintre d'un monde à part, il fut toutefois un portraitiste recherché puisqu'il représenta sur commande du Vatican le portrait du pape après avoir fréquenté les Dadaïstes de la première heure à Zurich, ville où il s'était installé dès 1914 pour ne pas avoir à faire la guerre sous l'uniforme allemand.
Schad fut le témoin de toutes les révolutions artistiques de son temps mais s'attacha à rester fidèle à sa palette, froide, intransigeante, sarcastique et érotique à souhait. Il s'intéressa un moment à la photographie en créant des images appelées « Schadographies » tout en continuant à produire des peintures où il se mit parfois en scène avec un regard interrogateur sur le sens de la vie et de son environnement qu'il devait vraisemblablement comparer à un grand bordel.
Schad fut probablement avec George Grosz l'un des peintres les plus cyniques de l'école allemande de l'entre-deux guerres mais alors que le premier se sublima en dénonçant les horreurs de la guerre, il préféra de son côté jouer dans le registre d'une certaine perversité déguisée en montrant des femmes sous une lumière crue, belles et froides, l'une exhalant son vagin comme une invitation à la débauche, ou parfois décaties, usées par les plaisirs d'une vie où l'amour vrai semble cruellement absent.
Adrian Darmon