Avec la chute de l'Empire romain et l'avènement de la chrétienté, les objets d'art païens disparurent de la circulation tout comme les marchands et ce ne fut plus que dans les cathédrales et les églises que des oeuvres, dédiée essentiellement au culte, furent exposées à la vue des fidèles qui les considéraient alors avec une dévotion toute religieuse. Il fallut attendre le XVIe siècle pour voir réapparaître des expositions en dehors des églises alors que le terme « exposition » ne fit son entrée dans le dictionnaire qu'à la fin du XVIIIe siècle.
Au XVIe siècle donc, les peintres et réalisateurs d'objets artistiques avaient pris l'habitude de vendre leurs œuvres dans des ateliers-échoppes, une pratique répandue en Italie, dans les Flandres, les Pays-Bas et en France qui les associa étroitement aux activités des artisans auxquels ils ne désiraient pas vraiment être assimilés.
La nécessité s'imposa donc de trouver des méthodes plus valorisantes pour promouvoir leurs œuvres. C'est ainsi que naquit en France au milieu du XVIIe siècle l'Académie Royale de Peinture et de Sculpture dont les membres étaient tenus de ne plus vendre leurs œuvres dans des échoppes. De ce fait, la pratique de la vente en boutique fut progressivement abandonnée d'autant plus que nombre de peintres furent alors tentés de faire partie de l'Académie dont le prestige leur assurait une ascension sociale certaine.
Dès lors, les académiciens attirèrent leur clientèle dans leurs ateliers en bénéficiant au préalable de la présentation de leurs oeuvres au Salon organisé cahin-caha à partir de 1667 puis tous les deux ans lors de la Régence.
Le Salon de l'Académie prit une importance manifeste dans la vie artistique du XVIIe siècle car il permit la présentation simultanée d'œuvres d'une multitude d'artistes et éveilla l'intérêt d'un public de plus en plus averti mais encore limité puisque celui-ci était pour une très large part issu de la noblesse. A cet égard, les tableaux peints par divers artistes flamands, dont David Teniers, représentant des galeries d'art créées par des princes de haut rang marquèrent probablement les esprits en France où Louis XIV voulut faire du château de Versailles un musée et de ses jardins un musée en plein air pour exposer et manifester sa gloire.
Les Salons n'eurent au départ pas de but commercial mais une fonction esthétique qui permit l'éclosion du goût et l'apparition des critiques et historiens d'art. En parallèle, les anciennes foires héritées du Moyen Âge continuèrent à être organisées place Dauphine et sur le Pont Neuf par l'Académie de Saint-Luc auxquelles participèrent nombre de peintres de talent comme Watteau ou Chardin. Celles-ci eurent par contre un caractère commercial alors que le Salon de l'Académie Royale fut soumis à un critère rigoureux de sélection dès 1746 avec l'instauration d'une commission qui préluda à la formation du jury des Salons du XIXe siècle.
Entre 1667 et 1760, le Salon de l'Académie attira surtout les esthètes issus de la noblesse et les érudits alors qu'en Angleterre et surtout en Hollande, le public des amateurs était déjà composé d'aristocrates et de riches bourgeois. Il fallut attendre le début des années 1780 pour voir émerger en France une nouvelle catégorie de collectionneurs qui se multiplièrent ensuite sous l'Empire.
Au XIXe siècle, l'éclosion de l'art s'accompagna par l'accroissement des Salons, surtout sous Napoléon III et la IIIe République lorsque furent organisés des manifestations parallèles au sacro-saint Salon officiel (qui attira notamment près de 500 000 visiteurs en 1878) auxquelles participèrent notamment les artistes impressionnistes rejetés par son jury.
A partir de 1880, les Salons eurent tendance à se multiplier d'autant plus qu'au goût s'était substitué un propos commercial, les artistes privés de commandes publiques cherchant alors à exposer leurs œuvres dans des manifestations qui prirent vite de l'importance comme le Salon de la Société des Beaux-Arts, le Salon des Indépendants, le Salon d'Automne ou le Salon des Tuileries.
Le public, de plus en plus nombreux, y trouva son compte même si certaines manifestations étaient courues pour s'y montrer ou pour trouver matière à se moquer des artistes qui de toute façon purent trouver des débouchés pour vendre leurs œuvres surtout que nombre d'entre eux traversèrent une période de disette après la guerre de 1870 et la Commune.
Au début du siècle dernier, la mode des expositions battit son plein et devint un « must » pour les artistes qui voulaient se faire connaître et vivre de leur peinture.
L'émergence du marché de l'art et son développement a ainsi dépendu en grande partie des expositions lesquelles ont permis de faire découvrir et même redécouvrir une multitude d'artistes et de tendances. Aujourd'hui, l'accent est mis sur de nouvelles formulations, notamment la présentation de confrontations (Matisse-Picasso par exemple), d'écoles (tel le XVIIIe siècle français ou l'art vénitien) et d'installations qui ont notamment permis une meilleure compréhension de l'histoire de l'art.
On ne peut oublier le rôle des expositions universelles, organisées dès la seconde moitié du XIXe siècle dans la mouvance de la révolution industrielle, qui donnèrent une dimension planétaire aux manifestations culturelles présentées dans de nombreuses capitales en permettant aux artistes de nombreux pays de se sublimer et aux nouvelles tendances de s'exprimer tout en donnant ainsi lieu à des échanges fructueux qui bénéficièrent au développement de l'art.
On ne négligera pas non plus le fait que les expositions organisées dès la fin du XIXe siècle permirent une augmentation progressive de la fréquentation des musées qui furent par la suite agrandis ou rénovés alors que d'autres se créèrent comme le Centre Pompidou à Paris en 1973 et que ces manifestations ouvrirent la voie à la présentation d'expositions thématiques qui connurent un énorme succès à travers le monde à partir des années 1970.
Depuis ces trente dernières années, il ne s'est pas passé une semaine sans l'organisation de nouvelles expositions dans des musées- la moyenne se situant à près de 10 par an- ou des galeries. A titre d'exemple, le Centre Pompidou a organisé à lui seul près de 350 expositions d'art plastique et de photographies entre 1977 et 1985.
A cela, s'est ajoutée l'organisation de biennales et de foires d'art contemporain devenues incontournables comme la Fiac, Art Miami, Art Cassel, Art Basel, Frieze et bien d'autres qui ont attiré des centaines de milliers de visiteurs motivés non seulement par la découverte des artistes mais aussi par le désir d'acheter.
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