Le Frac Lorraine et le Centre d'art contemporain de Brétigny présentent jusqu'au 1er mai 2005 la première exposition d'envergure de Teresa Margolles en France, après son importante rétrospective au Musée d'art moderne de Francfort en 2004. L'artiste mexicaine réintroduit la mort parmi les vivants le temps d'une exposition qui se déploie simultanément sur les deux sites. À découvrir, une oeuvre puissante, fascinante et existentielle.
Les travaux de Teresa Margolles (née en 1963) l'ont conduite à s'intéresser à la médecine légale jusqu'à devenir techinicien médico légal à la morgue de Mexico-city. Si elle travaille aujourd'hui en solo, elle fut également l'âme de SEMEFO de 1990 à 1999, collectif mexicain bien connu pour ses performances dans l'espace public et pour son utilisation de matériel organique provenant de corps affectés de morts violentes.
Teresa Margolles se fait le relais des personnes assassinées, des corps sans voix oubliés en toute impunité, de la peur et surtout de la douleur des familles. Avec beaucoup d'humanité et de respect, elle exprime le silence et tend à éliminer la distance que nous plaçons entre nous-mêmes et les morts.
La mort, ses causes ou circonstances sont pour elle révélatrices d'une société : les cadavres qui remplissent les morgues (victimes de la délinquance, de violences liées à la drogue, corps anonymes) rendent perceptibles la « santé » sociale et économique de la mégalopole.
L'artiste porte cet aspect documentaire de son travail vers une extrémité existentielle. Évitant d'exhiber l'horreur et dépassant les frontières esthétiques, elle joue au contraire sur la puissance de l'imaginaire du spectateur et parvient à suggérer l'inconcevable avec les moyens et les références de l'art minimal.
Le Frac Lorraine présentera une installation : une simple goutte qui tombe régulièrement du plafond pour former progressivement une flaque. Cette substance graisseuse, que l'artiste a pu ramener de la morgue de Mexico provient du corps des morts, et dont elle se sert également pour l'une des deux pièces qui sera produite pour son projet au Centre d'art contemporain de Brétigny : un mobilier en béton exposé à l'extérieur. Pour l'autre pièce, Fossa Comun/Fausse commune, un nouveau sol en béton sera coulé à l'intérieur du Centre d'art à partir de l'eau ramenée de sa ville natale de Culiacán, connue au Mexique pour sa violence liée notamment au trafic de drogue.
Ses oeuvres frôlent les limites de l'acceptable, questionnant ainsi le rôle de l'art et des artistes.