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LES ARTS PREMIERS AU LOUVRE
01 Avril 2000


Les Arts Primitifs sont entrés au musée du Louvre depuis le 13 , une grande date qui consacre leur importance dans l'histoire de l'art.

Cette grande première est l'oeuvre de Jacques Kerchache, marchand d'art africain, qui a réussi la prouesse de réunir une selection d'un peu plus d'une centaines d'oeuvres africaines, océaniennes ou précolombiennes au sein d'un musée qui a mis l'accent durant près de deux siècles sur l'art classique occidental ainsi que sur les grandes réalisations de l'Antiquité.

C'est dans un espace conçu par l'architecte Jean-Michel Wimotte dans les anciennes écuries du Pavillon des Sessions que sont abritées ces chefs d'oeuvre dont certains ont été prêtés par des musées. On entre dans un univers secret, magique, sinon féérique qui précéde la création par l'architecte Jean Nouvel du musée des arts primitifs sur le quai Branly dans trois ans qui accueillera alors près de 400 000 pièces. On ne sait si le pavillon des Sessions continuera à présenter ces oeuvres une fois que le musée du quai Branly aura été inauguré.

C'est en 1990 que Jacques Kerchache a fait publier dans le journal «Libération» un manifeste co-signé par 150 intellectuels et personnalités réclamant l'ouverture d'une huitième section au Louvre consacrée au x arts primitifs. Le président Jacques Chirac s'est montré convaincu cinq ans plus tard mais le Louvre a fait de la résistance. Il aura finalement fallu attendre plus de trois ans avant que cette idée puisse être concrétisée mais il n'en reste pas moins que les conservateurs du Louvre souhaitent toujours que cette exposition permanente de l'art primitif ne soit pas éternelle.

Bref, une lutte forcenée se déroule dans les coulisses entre les responsables du musée et Jacques Kerchache qui compte voir ces chefs d'oeuvre rester en permanence au Louvre. Mais c'est là où la question se pose car s'ils restent dans ce lieu, ils manqueront quelque part au musée du quai Branly puisqu'ils sont parmi les plus représentatifs du domaine des arts primitifs.

N'oublions pas non plus le vif débat qui occupe les ethnographes et les tenants de l'esthétisme, les premiers se montrant scandalisés de voir l'aspect ethnographique délaissé au profit de la beauté esthétique des pièces. Jacques Kerchache ne vise que l'esthétisme sans chercher à donner une quelconque importance aux civilisations dont ces pièces sont issues sans compter que leur choix procède d'une vision particulière, sinon arbitraire, qui repose beaucoup sur un regard occidental alors que les objets présentés ne bénéficient pas d'une aide pédagogique pour les visiteurs.

En attendant, le Louvre a bénéficié d'une enveloppe de 150 millions FF pour ses acquisitions en matière d'arts primitifs mais déjà fusent des accusations concernant des acquisitions faites à des prix jugés excessifs par les détracteurs de Jacques Kerchache sans compter est que Louvre a été fustigé pour avoir acquis deux objets Nok du Nigéria qui n'auraient normalement pas dû sortir illégalement de ce pays. A titre d'exemple, les autorités nigérianes ont demandé la restitution de deux autres sculptures Nok exposées à la foire des antiquaires de Maastricht.

Le Louvre se défend en affirmant avoir seulement voulu faire connaître la culture Nok au milieu de tant de chefs d'oeuvre et rappelle avoir bénéficié d'une convention de coopération avec Lagos autorisant cette acquisition à titre exceptionnel, la France s'engageant à financer et aider la protection du patrimoine nigérian. Mais comme le signale «Libération» le plus drôle est que l'UNESCO n'a pas hésité à parrainer cette exposition du Louvre alors que cette organisation est censée assurer la protection du patrimoine mondial.

En attendant, le choix des oeuvres présentées par Kerchache a ceci qu'il est complètement personnel alors que ses détracteurs ne manquent pas de signaler sans cesse son activité de marchand qui pourrait lui donner une position avantageuse sauf qu'en réalité celui-ci n'exerce plus son métier depuis plusieurs années. Il n'empêche, Kerchache est un des meilleurs spécialistes des arts premiers qui a au passage constituté une très belle collection sans toutefois trop se soucier des conditions dans lesquelles certaines pièces ont été sorties d'Afrique. A cet égard, il n'aura certainement pas été le seul collectionneur dans ce cas.

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